" Un acteur professionnel ressent une sorte de tension. Cela désarçonne l'amateur, mais le professionnel en a besoin. "
Lorsque j'ai fais la promesse de rester aux côtés de Mathilde, je me suis également porté garant de son bonheur. Sa famille a suffisamment été brisée pour que je les laisse périr sans rien faire ! Ils sont ses trésors et jamais je ne pourrais me permettre de les piller. Je suis un explorateur, pas un monstre ! Ahah ! Avec moi, le bonheur de ma maîtresse est bien gardé et, je ferai tout pour le raviver ! Et pourtant.. J'avais peut-être fait une bêtise en lui demandant de venir ici. Déjà, parce qu'il y avait des chats et que je craignais pour nos vies - à Cody et à moi - mais aussi parce cet endroit semblait rappeler de mauvais souvenirs à Mathilde. Qu'est-ce qui avait bien pu se passer ici ? Au vu de ce qu'elle m'avait raconté, je n'osais imaginer..
Durant de longues secondes, l'américain resta là, les yeux grands ouverts face à cet animal aussi noir que son âme à lui l'était. Ah, des exorcistes, il voulait bien, mais pas des chats ! Ces sales bêtes risquaient de croquer Cody d'un instant à l'autre et si ça venait à arriver, l'enfant-machine ne se le pardonnerait pas. Déjà qu'il avait énormément de choses sur le cœur.. mais perdre leur ami de toujours, c'était pire que tout. S'il devait se battre avec cette bête assoiffée de sang, alors Elliot le ferait ! Quitte à en perdre des plumes ! Enfin, ça, ce fut sans une douce intervention de l'Abnégation.
" Oh, ne t’inquiète pas, il ne nous fera aucun mal… Ce sont aussi mes petits amis vois-tu ? "
Surprit, l'Oiseau en Cage laissa l'angoisse retomber un peu, tandis que son unique œil se posait en direction de la douce demoiselle. Ah, ça, c'était un problème. Ne sachant pas vraiment comment réagir, le blondinet laissa tout d'abord une grimace étirer son visage ; puis, un sourire. Quel étrange gamin ; bien trop naïf pour survivre en tant que véritable humain.
" Ah ! Les chats sont vos amis.. ? ... Alors, ils.. seront. les nôtres. aussi. ... Oui ! Tant qu'ils ne touchent pas à Cody, ça me va ! "
Un rire s'échappa alors des lèvres du petit homme, tandis que toute crainte semblait - presque - avoir disparu. Enfin, tout du moins jusqu'à ce que la tension ne commence à monter, et que la jeune Lockwood ne lui attrape les épaules pour la serrer contre. Que se passait-il donc ?
" Elliot… "
" Hu, Math-... "
" Que se passe-t-il ? "
Cette voix.. L'enfant était presque sûr de l'avoir déjà entendue, mais impossible de la replacer avec exactitude. Qui était-ce ? Il crut comprendre, non pas à cause de ses autres mots, mais plutôt grâce à la silhouette qui s'était détachée en haut des escaliers. Il l'avait déjà vue, une fois, cette ombre presque menaçante et supérieure. Aloïs Lockwood. Pourtant, pourtant il y avait quelque chose de différent cette fois-ci. Les sens de l'enfant-machine étaient troublés et sa matière noire bouillonnait, sans qu'il ne puisse dire pourquoi. Était-il vraiment celui qu'il prétendait être ? Oh, le petit aurait pu se taper sur les doigts pour avoir de si sombres pensées ! Mais cet homme, là, ce n'était pas un descendant de Noé.
" Je vois que ce que tu m'as écrit est vrai, Elliot. Elle est plus.. mature et joyeuse. C'est bien.. "
Le chat feula alors, tandis que le gamin lui tira la langue pour toute riposte ; ils avaient le droit d'être ici après tout, comme l'autre truc l'avait dit. Couvrant le chat, un grognement sourd se fit entendre de l'Ombre. Comment un Akuma pouvait oser demeurer dans ces lieux, sans l'approbation d'un maître Noé ! Car, oui, le petit en était désormais presque certain : l'autre n'était pas Aloïs. Mais son aura était étrange, brouillée, faite de matière noire. Une illusion de la bête cachée dans l'Ombre ? Il y avait des chances..
Toute aussi perdue que son petit camarade, Mathilde souffla quelques mots à sa drôle de moitié, avant de reporter son attention vers le blondinet. Avec tout ça, le petiot ne savait plus vraiment où se mettre. Elle lui chuchota quelques mots, souhaitant récupérer quelques affaires, puis de partir ; avant de s'adresser à son double.
" Je… je récupère mes... dernières affaires, et nous partons… "
Le petit - ne pouvant refuser de la suivre - hocha alors la tête, avant de se lancer à sa suite dans les grands escaliers, jusqu'à sa chambre à l'étage. Silencieux, ne sachant pas vraiment quoi dire, Christopher la suivit comme son ombre, se refusant à faire un pas de côté même lorsqu'ils furent arrivés dans sa vaste chambre. Un lieu qui aurait pu faire office de havre de paix, mais qui ne put qu'attiser encore plus la tension.
Il fut presque collée à la jeune parisienne lorsque celle-ci lui confia des pochettes en cuir, tout en lui donnant des instructions :
" Tiens, je t’en confie une partie… "
" J'en pendrai grand soin, je vous le promets. "
Et, tandis que la Lockwood reprit la fouille de ses armoires à la recherche d'objets du passé, l'Akuma resta là sans bouger, l'observant en silence ; et tous savaient à quel point ce n'était pas dans ses habitudes. Pourtant, pour une fois, Elliot n'avait plus rien à dire, peut-être même plus la force de sourire ; tout ça à cause du désespoir de sa maîtresse. Il était palpable, dérangeant, et pesait lourdement sur le cœur mort de la machine.
Et pourtant, il fut comme apaisé l'espace d'un instant, tandis que la belle retrouvait son sourire tout en s'agenouillant face à l'enfant.
" Reste derrière moi... "
Tandis que l'américain hocha la tête, la jeune femme se releva ; avant, qu'ensembles, ils ne se dirigent vers le couloirs. Mais au lieu de tomber nez-à-nez avec la Trahison, il n'y eut rien, le néant, pas même un Akuma caché dans l'ombre.
" Hihihhihihihihihihihihih !!! "
Surprit par ce rire et par cette porte qui s'était claquée, l'enfant-machine manqua de faire tomber tout ce qu'il tenait en main ; heureusement, plus de peur que de mal. Mais, bordel, c'était quoi ce truc ? Presque terrifié, le petit finit par relever la tête en direction de son interlocutrice ; et, elle, fit de même.
" Je ne sais pas ce que c'était... Mais nous devrions partir... " fit-elle tout en lui attrapant la main, avant de descendre les escaliers pour quitter l'étrange maison hantée, " Je suis désolée... Allons vite manger quelque chose... ça vous nous changer les idées. "
Elle n'avait pas tort, pourtant, la jeune femme n'avait aucune excuse à lui donner. C'était lui qui avait insisté pour se rendre là, pour voir cette ancienne maison ; pas l'inverse. Inquiet vis-à-vis de l'état de celle qu'il aimait tant, le petit mit malgré tout un long moment avant de parler à nouveau.
" Est-ce que.. tout.. euh.. va bien ? " tenta-t-il de demander dans un premier temps, avant de se reprendre, " Enfin, je.. je sais que non, c'était stupide comme question. "
Nerveusement, un sourire finit par traverser le visage du marmot, tandis que son regard se portait vers ses chaussures. Ah, il les avait presque oubliées celle-ci, ses belles chaussures bien cirées. Elles semblèrent tout à coup très intéressantes ; bien trop.
" C'est moi qui suis désolé de vous avoir demandé de venir ici, maîtresse. " souffla-t-il alors d'une petite voix.
Ce n'est qu'après avoir lancé ces quelques paroles que l'Oiseau en Cage put redresser la tête, avant d'apercevoir une petite échoppe qui vendait des glaces, non loin de là. Presque revigoré par cette vision - et espérant qu'il en soit de même pour Mathilde - les doigts du petit se serrèrent sur les siens avec vivacité.
" Venez ! "
Puis, un peu plus rapidement, il l'entraina jusqu'au dit marchand. Cette journée devait être belle, bon dieu !