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Bonnie R. O'Cahan
you’re in the wrong place with the wrong person
La plage était déserte. Il faut dire qu’Amorem n’avait pas croisé beaucoup de monde en arrivant ici — quelques habitants parfaitement lucides sur leur condition, compte tenu de l’emprise qu’avait le Comte sur le Japon et ses îles. Elle avait pris le temps d’échanger avec eux, de se renseigner avant tout — la moitié était des brookers, et l’autre moitié ne survivait que grâce à la protection dont bénéficiaient les premiers. C’était d’ailleurs avant tout pour les protéger que l’apôtre avait été envoyée ici, sur l’île de Kyūshū. La mission était simple : récupérer l’Innocence qui agitait la région avant qu’elle ne fasse subir aux habitants le même sort qu’avaient subi ceux d’Édimbourg quelques semaines plus tôt. Il faut dire que la nouvelle avait rapidement fait le tour du monde, et qu’elle se répandait de toute façon plus vite lorsque les descendants de Noé y étaient mêlés — et compte tenu du nombre impressionnant de volcans en activité qu’abritaient les environs, les partisans du Comte avaient rapidement fait remonter l’information jusqu’à ce dernier. Personne ne voulait revivre les événements qui avaient secoué l’Écosse, même au sein du clan Noé (surtout pas au sein du clan Noé, en vérité — ce jour était perçu comme une véritable catastrophe et une terrible défaite face à l’Innocence). Alors, lorsque la présence d’un cristal divin avait pu être certifiée, et précisément à l’intérieur d’un volcan, Adam avait décidé d’y envoyer Bonnie : sa lumière lui permettait de passer à travers la matière sans en subir les effets.
Évidemment, aucun akuma n’avait voulu s’y rendre.
Enfin. Comme prévu, l’Amoureuse n’avait eu aucun mal à récupérer l’Innocence ; qu’elle tenait à présent dans sa main. Elle l’observait avec une attention toute particulière, scrutait l’objet divin — maudit — sous toutes ses coutures, à la recherche d’un secret qu’il n’avait peut-être pas encore révélé (Des secrets, le cube en dissimulait plusieurs, elle n’en doutait pas. Il y avait d’abord la cristallisation, que l’Ordre Noir n’avait découvert que récemment — et à laquelle s’était heurtée plusieurs fois. Puis, récemment, Apocryphos avait refait surface — et Apocryphos ne se manifestait que lorsque le Cœur de l’Innocence était en danger. Son apparition ne pouvait signifier qu’une chose : le Cœur était sorti de sa cachette, et le clan Noé l’avait directement menacé, d’une façon ou d’une autre. Sa première pensée alla à l’Innocence des Bermudes et d’Édimbourg. La seconde fut pour Allen, puis Neah et enfin, elle chassa ces trois-là de son esprit.) Sous cette forme, le cristal semblait inoffensif — bien loin des tragédies qu’il engendrait et perpétuait depuis plus de sept-mille ans. C’était, au final, sans doute le secret le mieux gardé : le caractère meurtrier et destructeur de ce qu’une partie de l’humanité voyait comme salutaire.
Amorem brisa l’Innocence.
« Tu es arrivée trop tard, » souffla-t-elle simplement d’une voix grise, sans couleurs — il n’y avait pas l’once d’une provocation dans le ton qu’elle avait employé. « mais cela n’est pas encore trop tard pour toi... » Elle se retourna vers l’origine des pas qu’elle avait entendu derrière elle, et aperçut — surprise — la silhouette d’une exorciste qui n’était pas inconnue au sein du clan Noé. « ... Maréchale Cloud Nine, » salua-t-elle simplement, tandis que ses mains se changeaient déjà en lumière. « si tu me remets ton Innocence, nous ne serons pas obligées de nous battre. »
Elle avait prononcé ces mots par habitude, et par habitude, elle savait qu’ils n’auraient aucun poids sur le choix de la maréchale. Alors elle se mit en position de combat, les sens en alerte. Cloud était puissante, comme l’étaient tous les maréchaux (elle n’avait pas oublié la douleur dans son front).
Dire qu’elle avait espéré pouvoir admirer l’océan un peu plus longtemps...
Échec de la mission...
