l’amour est dans le pré — sua, edith & felipe

L'Espagne. Felipe avait le cœur gonflé de bonheur à l'idée d'y remettre les pieds et dès lors qu'il avait senti la chaleur se répandre sur sa peau, le vent chaud soufflant dans ses cheveux, le torero s'était senti chez lui, à la maison. Pas de missions ce jour-là, pas de mains à souiller encore davantage. Aujourd'hui, c'était son anniversaire et Bonnie lui avait proposé de passer une journée au grand air. Sua et Édith était elles aussi de la partie et bien que Felipe ait un caractère trempé, il avait ressenti ce petit quelque chose agréable en entendant cette proposition venue tout droit de l'Amour avec laquelle il n'avait pas toujours été tendre. Les jours avaient défilé, et l'Espagnol avait regardé les dates se succéder jusqu'au 21 Mai. La veille, il n'avait pu trouver le sommeil car bien des choses avaient traversé son esprit – souhaiter passer ce jour avec Charlotte, par exemple, ou encore faire un tour à Séville pour revoir Laurencia et l'accompagner sur sa propre tombe pour y déposer des fleurs – mais il trouverait le temps pour elles (il en aurait toujours) et avait donc attendu Édith devant le portail de l'Arche avant de se rendre jusqu'à son pays natal.

Les mots espagnols qui roulaient sur les langues et résonnaient jusqu'à lui lui faisaient toujours énormément de bien. Felipe était attaché à ses terres, attaché à sa culture et à sa langue et l'enthousiasme se lisait dans ses yeux, s'exprimait à travers son sourire. Il marchait en direction de la gare, ses yeux émeraudes s'égarant parfois vers Édith pour être sûr qu'elle le suivait toujours et qu'elle n'avait pas été embarquée par la foule assez dense. Lorsqu'ils passaient devant des places connues, Felipe ne pouvait s'empêcher de lui en parler, son regard se promenant vers les lieux qu'il reconnaissait. Ce n'était pas spécialement des endroits qu'il avait foulé souvent, mais il se rappelait de ses découvertes avec Laurencia, qui avait pris soin de lui plus que n'importe qui d'autre, et bientôt, son regard fut attiré par le bâtiment où les trains laissaient s'extirper du conduit la vapeur brûlante. « Ah, regarde ! On y est. » dit-il, le cœur battant un peu plus vite face à l'excitation qui grimpait au fur et à mesure. Il s'engouffra parmi les nombreux voyageurs, et s'arrêta ensuite près d'un poteau où il y avait un peu moins de monde. Les bras croisés sur sa poitrine, il lançait des regards par-dessus la foule. « J'espère qu'elles seront à l'heure. » dit-il en se mordant la joue, l'impatience se lisant sans mal sur son faciès. Et son cœur bondit dans sa poitrine en sentant que quelqu'un venait de lui poser un chapeau sur la tête.

Instinctivement, ses pensées le ramenèrent à ce jour où Adélaïde avait osé mettre la main dans sa poche en quête de richesse à emporter avec elle, et ses sourcils se froncèrent, le regard embrasé se détournant vers la silhouette qu'il aperçut se glisser jusque devant Édith et lui. Feliz cumpleanos Felipe. S'il s'était apprêté à lui renvoyer son chapeau dans la figure, croyant à un sale coup d'un inconnu, il se ravisa bien vite en entendant ces mots, en voyant ces yeux pétillant de bonheur. Il fut surpris, et garda la main plaquée sur son chapeau d'anniversaire pendant quelques instants avant que son sourire ne retrouve sa place sur son faciès. « Oui, c'est comme ça qu'on dit. Gracias, señora ! » dit-il en sentant son cœur se réchauffer. La situation était bien différente de ce qu'ils vivaient tous au sein de l'Arche, au milieu de cette Guerre Sainte et l'Akuma ne pouvait qu'apprécier – d'autant plus qu'être le principal concerné par cette journée ne lui déplaisait pas. Il ne manquait plus que Bonnie – celle-là même dont il pensait qu'elle arriverait avant eux – et finalement, la voyant à travers la foule, il leva le bras pour lui faire signe.

L'Amour se fraya un chemin jusqu'à eux, se répandant en excuses et Felipe leva les yeux vers l'horloge. « Juste à temps ! » dit-il, un sourire satisfait sur les lippes avant qu'il ne prenne son billet de train, ses yeux émeraudes scrutant la gare avant qu'il ne voit le train qui leur était destiné. « Par là ! Vamos ! » dit-il avant de se diriger, bagage en main et chapeau sur la tête, en direction du train à vapeur qui n'allait sans doute pas tarder à partir. Jetant un regard au billet, il observa les wagons et finit par trouver celui dans lequel ils devaient monter. « C'est celui-là. » dit-il en tapotant de sa main libre le wagon, pénétrant avec Sua, Edith et Bonnie dans le compartiment jusqu'à prendre place sur les sièges alors que les bagages étaient emmenés à l'arrière. Les rayons du soleil filtraient à travers la vitre entrouverte, et le regard émeraude de Felipe se tourna vers l'extérieur. Le son strident annonçant le départ résonna dans la gare.
         
          Halloween