Le Bon Pasteur
20-21 Juin 189X+1 – Paris | Tu gardais l'échange avec le Maréchal aux mains souillées du sang de ton père dans un coin de ta tête, ton cœur préservant cette colère qui jamais n'était partie depuis l'incident provoqué par cette Innocence que tu avais détesté depuis lors. Petit à petit, tu espérais pouvoir mener le Phare à un échec dont il se souviendrait, lui brûler les ailes et le mettre hors d'état de nuire, mais ton rôle de Brooker te menait à devoir laisser tes préoccupations de côté pour te concentrer sur cette nouvelle tâche que l'on t'avait attribué. Toi qui étais si discret – simple humain ordinaire car tu n'étais qu'un homme – tu devais te renseigner sur Le Bon Pasteur et les miracles qu'il semblait faire. Ses prouesses médicales avaient attiré l'oeil de ceux qui t'avaient assigné cette mission et tu n'avais alors pas perdu plus de temps, emportant une valise avec quelques affaires avant de prendre le train. La machine galopante sur les rails avait bercé ton voyage du bruit de sa mécanique et la voix de ces hommes, femmes et enfants non loin de toi aussi.
Toi, tu avais gardé les yeux figés sur tous ces paysages qui avaient défilés devant toi et avait fini par sortir du train, la mine toujours aussi désintéressée alors que tu plongeas la main dans ta poche, te dirigeant vers un hôtel où tu y déposas tes affaires avant d'en ressortir. Tu sortis de ta poche un morceau de papier froissé où tu y avais inscrit quelques informations de base sur la situation et cet individu qui en intriguait plus d'un, et tes mirettes se promenèrent sur ton écriture élégante. Un miracle surviendrait au solstice d'été, le 21 juin. Innocence, Noé ou simple médecin brillant et volatile ? Cabinet déplacé, se renseigner aux endroits principaux. Et tu relevas alors la tête, contemplant la capitale qui s'étendait tout autour de toi, animée de tous les côtés.
Les rives de la Seine pourraient être une bonne idée pour commencer, et tu t'y dirigeas alors, te frayant un chemin à travers les passants, les odeurs se multipliant à chaque fois que tu passais devant un café, une auberge, une poissonnerie et tous ces autres magasins aux senteurs variées. Tu rangeas le papier dans ta poche, et marchas d'un pas tranquille. L'on ne pouvait te soupçonner de quoique ce soit. Tu n'avais ni de Souvenir au creux de ta chair, ni d'Innocence abritée dans ton corps. Tu n'étais qu'un homme paraissant simple touriste ou promeneur du matin, qui allait pêcher des informations par curiosité.