Tôt dans l’après-midi à Paris, dans une ruelle quelconque, une vitre se brise soudainement dans une boutique de bijoux. Deux hommes en ressortent, munis chacun d’une arme à feu et d’un sac à moitié rempli de bijoux en tout genre. Une femme hurle en voyant une des armes braquée sur elle. La dame implore de lui laisser la vie sauve et les deux scélérats s’enfuient à toutes jambes. Tous deux récupèrent un chariot et tente d’échapper à un officier de police qui se trouve dans la rue. Des coups de feu animent le quartier et un homme s’écroule sur le sol. Du sang s’échappe lentement sur sa jambe gauche. Il se met à crier de douleur. Un citoyen qui ne demande rien, et qui souhaite passer sa journée tranquillement. Mais ce n’est plus le cas. Le policier décide de s’occuper du blessé, les fuyards disparaissent avec leur butin.
Plusieurs centaines de secondes plus tard, les deux hommes abandonnent leur chariot pour se faufiler dans des ruelles plus étroites et moins visitées par les citoyens de Paris. Ils courent le plus vite possible pour tenter d’échapper à la justice et pour se réfugier dans une planque et savourer avec une bonne bière leurs butins. Ils voient tout à coup une vielle dame de dos tenant son sac à main. Une occasion en or d’augmenter leur trésor. Le premier homme agrippe férocement le sac et tente de l’arracher à la femme âgée. Le deuxième voleur s’apprête à montrer un sourire carnassier en pensant déjà au petit bonus qui doit se trouver à l’intérieur du sac, mais il affiche soudainement une expression de surprise. En effet, son collègue mange le sol à cause de la vielle dame.
La dame émet un léger sourire et se redresse pour montrer son visage. Enlevant son chapeau pour libérer sa tignasse blonde, elle se met à soupirer.
« L’enquête reprend, annonces-tu en sortant une cigarette. »
Une tension entre toi et les deux voleurs survient. D’instinct, ton cerveau travaille sur une méthode afin de les arrêter le plus rapidement possible. Tu te mets à respirer lentement pour diminuer ton stress et te permettre de réfléchir beaucoup plus vite. Tu aperçois soudainement un scénario de ce qui va se produire dans moins de quelques secondes. Ton palais mental te dicte les mouvements appropriés pour conserver l’avantage et éviter de prendre des coups. Tu sors d’un mouvement lent une allumette de ta petite boîte puis tout un fixant un à un les voyous, tu allumes ta cigarette. Tu fermes tes paupières et tu répètes à présent dans ton esprit les actions que tu dois engager pour cette situation.
« Les avantages pour eux, leur nombre numérique, mon sexe. Mes avantages pour moi, me sous-estimer, le stress qui les ronge. Première étape, créer une surprise. Deuxième étape, débuter un combat singulier. Troisième étape, me servir du premier comme appât. Quatrième étape, la justice triomphe. »
Un duel de regard débute entre toi et tes grands voyous. Une goutte de sueur froide perle le long de ta tempe. Aurais-tu peur, toi, la plus grande détective d’Angleterre ? Tu sais quoi faire, inutile de stresser pour rien. Tu prends donc une bonne inspiration par le nez pour remplir tes poumons d’oxygène. Puis, tu recraches le tout par la bouche avec un peu de fumée de ta cigarette. Tu fais alors tomber ta canne de grand-mère. Sa chute est bizarrement lente et tu ne quittes pas du regard les deux hommes. Enfin, lorsque le bruit de choc de la canne se fait entendre, tes assaillants décident d’attaquer les premiers. Les battements de ton cœur sont très calmes, tu les observes se précipiter sur toi sans broncher. Tu laisses échapper ta cigarette depuis tes lèvres pour attraper quelque chose accroché à ta ceinture. Ta rapière du nom de Semiramis que tu camoufles soigneusement dans ton déguisement pittoresque. Ensuite, par un geste précis, tu dégaines ton arme pour découper en deux la ceinture d’un des voleurs. C’est ainsi que le pantalon du type tombe et le fait trébucher sur le sol. Le deuxième homme recule de quelques pas à cause de ton arme. Tu en profites pour te précipiter sur lui en faisant mine de vouloir l’embrocher pour un futur barbecue. Il te pointe avec son arme et avec un petit sourire, tu glisses entre ses jambes pour échapper au coup de feu. Le bruit est si fort qu’un sifflement strident gêne à présent ton ouïe. Tu te relèves avec une grande agilité et en un rien de temps, tu lèves ton pied entre les jambes de l’homme pour lui écraser ses bijoux de famille.
Tu as du mal à reprendre ton souffle et voilà déjà que l’homme ayant perdu son pantalon te pointe également avec son arme. Par réflexe, tu te places derrière son camarade pour t’en servir de bouclier. Il n’a plus l’envie de tirer par peur de blesser son acolyte et tu en profites alors pour ramasser un des sacs de bijoux. Tu le lances ensuite sur l’homme armé. Les bijoux se mettent à voler dans toutes les directions ce qui déconcentre ton adversaire. Ton cerveau t’indique à la volée un plan pour neutraliser l’homme. Un simple coup de poing est insuffisant pour l’assommer. Non, la première étape est une surdité partielle pour un premier angle d’attaque. En deux, la gorge pour paralyser les cordes vocales et étouffer un hurlement afin d’apaiser tes petites oreilles. En trois, toucher le foie au vu de son côté buveur. Pour conclure, en quatre, un coup dans la rotule pour lui apprendre à ne plus s’enfuir. Diagnostic rapide, évanouissement de 90 secondes, facultés martiales pour un quart d’heure au mieux, récupération complète peu probable.
Fermant les yeux une nouvelle fois, tu pousses ton bouclier humain sur l’homme pour le distraire une nouvelle fois. A ce moment tu t’approches comme un félin sur le voleur. Très rapidement, tu attribues une frappe sur son oreille gauche pour supprimer son ouïe. Ensuite tu plaques ta main violemment sur sa gorge pour étouffer le hurlement. Par la suite un coup de poing douloureux dans le foie et pour conclure la frappe dans la rotule. Des mouvements très rapides, mais pas aussi simples.
Soupirant de soulagement, tu menottes l’autre qui se plaint encore de ses pauvres bijoux de famille que tu viens de violenter.
« Vous savez mademoiselle Drake, dit une voix derrière toi. Vous vous ramollissez de jour en jour. A l’époque, vous étiez une tigresse au service de sa majesté. »
Rengainant ta rapière, tu ne te retournes pas tout de suite. Tu sais très bien qui est cette personne derrière ton dos. A vrai dire, tu te demandes combien de temps il prendrait avant de venir te parler. Depuis ton voyage en France, tu as remarqué qu’on te suivait sur tes moindres faits et gestes. Au début tu pensais à la Congrégation de l’Ombre. Voilà bien plusieurs mois que tu n’es pas retourné à ton nouveau chez toi. Finalement, tu as opté pour ton deuxième choix. Un majordome de la Reine Victoria.
« Le terme tigresse n’est pas approprié, ajoutes-tu d’un ton arrogant. Je dirais plutôt un lion, en référence à mon agressivité à vouloir résoudre ce que les gens ne peuvent résoudre, ou bien un renard par rapport à ma ruse. Mais sa majesté préfère le terme de chien. Tu allumes une seconde cigarette. Que voulez-vous Monsieur Warren ? Je vous manque à ce point pour m’espionner jour et nuit sur mes moindres faits et gestes ? Avec vos agissements, vous ressemblez à un pervers traquant une jeune femme innocente désireuse de trouver le grand amour. Tu te retournes pour le dévisager, tout en expirant la fumée de cigarette depuis tes poumons. Autant vous le dire clairement, vous n’êtes pas mon type et ce genre de distraction ne m’intéresse plus. »
Après un long silence, le majordome décide de sortir une lettre dans une poche de son manteau. Tu reconnais tout de suite le blason de la Reine. Manques-tu à ce point à la Reine ? Pourtant tu n’es qu’un pion dans son échiquier géant. Ne bougeant pas d’un pouce, tu laisses le soin à Monsieur Warren de te donner la lettre. C’est alors, que tu l’ouvres pour y apercevoir deux choses. Une lettre provenant de la Reine et une autre de la main de ton propre majordome John. Tu choisis de lire la lettre de la Reine.
« Ma chère Risa, j’espère que tout va pour le mieux. Voilà bien des années que votre présence me manque terriblement. Je respectais grandement votre père et j’étais si fière que vous preniez le même chemin que lui. Vous vous ressemblez beaucoup. Suite à votre problème avec votre ex-époux, je m’étais résignée à ne pas avoir recours à vos services pour résoudre des affaires pour le bien de l’Angleterre. Je désirais vous laissez en paix pendant un moment. Cependant, ce pays ne peut fermer les yeux sur une affaire en particulier. Depuis des années, la police se retrouve avec des séries d’assassinats impossibles à résoudre. Cet assassin ne laisse aucun indice derrière lui et ma colère en reste grande. Depuis quelques temps, il aurait mystérieusement disparu. Je vous demande votre aide dans cette affaire mademoiselle Drake. Pour le bien de l’Angleterre.
Victoria A. »
C’est en lisant cette lettre que tu es à présent bordée d’excitation. Voilà bien longtemps que tu n’as pas enquêté sur une affaire excitante. Tu t’ennuies tellement que tu t’interrogeais sur les faits et gestes de la responsable de l’auberge où tu loges. Comment dis-tu déjà ?
« Il n’y a qu’une affaire qui aujourd’hui pique ma curiosité : l’étrange affaire de mademoiselle Legrand, fantomatique logeuse. Je me suis intéressée à ses allées-et-venus qui s’avèrent de plus…sinistres. »
Tu émets un léger sourire puis tu ranges la lettre de John dans ta poche. Tu remarques la déception sur le visage de monsieur Warren. Il est évident que tu comptes lire le deuxième colis en privé. Pliant ensuite le courrier de sa majesté, tu l’insères délicatement dans l’une des poches de monsieur Warren.
« Je n’ai pas assez d’argent pour l’envoyer moi-même, ajoutes-tu doucement. Vu que vous êtes multitâche, je vous confie le rôle de facteur et également de perroquet. Dites-lui que j’accepte de résoudre cette enquête. Tu t’arrêtes quelques secondes pour chercher quelque chose dans ton déguisement, objet que tu trouves dans le sac de grand-mère. Une lettre écrite de ta main. Veuillez donner ceci à mon majordome. Pas la peine de la lire vous-même sans ma permission. Autant vous prévenir, mon message est codé et même sa majesté ne peut pas résoudre ce problème. Tu t’inclines doucement en guise de salutation. Je vous souhaite une bonne journée Monsieur Warren. »
Soupirant d’exaspération sur l’attitude de ce jeune homme au service de la Reine, tu tentes d’enlever ton maquillage avec un mouchoir tout en te remémorant les écrits de la Reine. Sans s’en rendre compte, sa majesté te donne déjà plusieurs indices sur ta nouvelle proie, ou plutôt ta source de divertissement. De plus, tu enquêtes déjà sur ces séries de meurtres. Tu as déjà examiné plus de trois corps à Londres. Cette personne est considérée comme un boucher. Tu as même lu plusieurs articles sur lui pour passer l’ennui. Rien n’est vrai, tout est faux. Les gens pensent à une femme d’autres à un homme et ce qui te fait le plus rire c’est des soupçons que ce soit une créature. Tes conclusions sont très courtes mais très claires. L’assassin utilise une arme blanche et une arme à distance, tu penses à une épée pour le corps à corps. Quant à la distance, difficile d’émettre des réponses. L’assassin ne laisse rien derrière lui. Ce n’est pas une femme mais un homme. Pourquoi ? A cause de la profondeur des blessures mais aussi sur la manière dont les victimes sont assassinées. De plus, à trop tuer en Angleterre, ont fini par changer de pays. Pourquoi pas Paris. Il y a cependant moins de dix pour cent de chance de trouver cet individu en France, et tu n’as jamais été chanceuse.
C’est en réfléchissant que tu enlèves progressivement ton déguisement de mamie. Oui tu enlèves des vêtements, mais sous ces derniers se trouve une tenue civil légère unisexe, tu n’es donc pas nue. Être nudiste ce n’est pas ton style. Soudain, tu t’arrêtes dans une rue en apercevant un garçon se tortiller dans tout les sens sur le sol. Te rapprochant, tu te mets à genoux pour lui tendre ensuite ta main. Pensant que ce dernier accepte d’être aidé pour se relever, ce misérable chenapan en profite pour voler ta bourse accrochée à ta ceinture. Tu en restes pétrifiée. Ton instinct de petite maman a tendance à baisser ta garde et tu en payes maintenant le prix. Mais par chance, il trébuche et se ramasse par terre. Aujourd’hui, mère fortune te souris. Tu l’attrapes donc l’arrière de sa veste tout en reprenant ton argent.
« C’est très malpoli de voler l’argent à une demoiselle, jeune homme, grondes-tu en le fixant droit dans les yeux. Un regard sévère et bouillonnant de colère. Pourquoi tu te tordais de douleur tout à l’heure ? Tu jouais la comédie ? Mon petit doigt me dit que tu as reçu un méchant coup. Qui t’as fait ça ? Si tu ne me dis rien, je te donne la fessée. »
Voyant que tu ne plaisante pas, le môme crache le morceau sur son mystérieux agresseur. Tes oreilles ne sont pas sourdes en entendant que l’homme possédait sur lui, une épée et une sorte d’arbalète. Misère, est-ce le type que sa majesté recherche ? Impossible ! Pas à Paris.
Tu te mets à réfléchir tout en ignorant le gamin qui souhaite avoir une petite pièce pour l’information. Ce gamin ne manque pas de cran, en fait il est plutôt gonflé. Il te vole, tu souhaites l’aider et voilà les remerciements. Sans plus attendre, tu lui donnes sa récompense. Avec un grand sourire, tu lui attribues une bonne fessée dont il est prêt à se rappeler. Tu te fiches des gens qui te regardent, mais aussi des pleures du gamin. Pour éduquer une fripouille rien de mieux qu’une bonne fessée. Le laissant ensuite partir, tu te frottes les mains, fier d’avoir été une mère exemplaire. Les fesses roses rendent aimable de toute façon.
Tu poursuis ta route en direction de ce bourreau d’enfants. Lui aussi mérite la fessée, mais en tant qu’adulte, c’est vu d’une manière différente. Attachant tes cheveux en chignon, tu ne te gênes pas pour voler en douce le chapeau d’un clochard et puis pourquoi pas une écharpe par la même occasion. Suivis par de la boue que tu étales sur tes joues pour te rendre moins charmante. Tout en cachant soigneusement ta rapière sous un manteau que tu trouves posé près d’un autre clochard endormi. Déguisement parfait pour que les gens évitent de te regarder. Puis, tu arrives à trouver la trace de la personne. Tu l’aperçois au loin, discret comme une ombre. Aucune personne ne fait attention à lui. Ta curiosité grandit encore et encore. Dans une filature, la plus grande difficulté est de se fondre dans la masse pour ne pas être repéré. Mais, si tu t’approches trop près, tu risques ta couverture. Tu le suis donc, discrètement en faisant mine de manger une pomme que tu as également volé. Oui, même si tu es amoureuse de la justice comme ton père, tu n’en es pas moins une sale voleuse. D’ailleurs ça te coûte cher, car le marchand te suit également et n’est pas très content. Tu appliques le plan B. Tu coures pour échapper au marchand. Tu t’arrêtes sur ta cible, tu lui attrapes le poignet.
« Un p’tit coup de main c’serait pas de refus m’sieur. Implores-tu d’une voix qui n’est pas la tienne. »
Tu sais très bien que cette action est risquée. Tu penses même franchir la ligne rouge… Mais tu es une Holmes, et aucune limite ne peut t’arrêter.