La vie est bien faite : quand elle est pourrie, elle se promet courte. Il n'y a pas une journée sans que j'échappe à une occasion de crever, de la tentative de meurtre à la simple infection, de cette fucking faim à l'abus d'alcool, de la maladie à l'envie d'en finir. Et ça, c'est sans parler de ces conneries d'akumas, de surhommes, de brookers… Laquelle de ces deux existences est la plus dangereuse ? Putain de bonne question.
Mais comme un rat, j'esquive. Je survis. La peste dans ma chair me tient debout ; et tant pis pour ceux que je contamine. Chacun pour soi, on brûlera ensemble… Mais pas aujourd'hui. Crever n'apaisera rien, l'Enfer m'attend probablement ; surtout si je laisse Elise et Joyce dans ce monde de merde avant de me barrer. Alors, je me démerde, et j'y deviens doué. Bordel, j'ai échappé à un volcan en activité... La chance ? La poisse, plutôt : mais pas seulement. J'ai compris les règles de base pour évite de finir dans un fossé puant, en sang.
Fuir, ou faire face avec un flingue quand la fuite ne suffit pas. Comme maintenant.
Ce type qui me suit depuis un moment. Discret, talentueux ; mais s'il y a bien un putain de truc qui ne foire pas chez moi, ce sont mes sens. Sauf le goût ; et vu les merdes que je suis forcé de bouffer, c'est une souffrance en moins. Bref. Cet enfoiré me trace depuis cinq minutes, en pleine nuit, et il n'a pas la gueule d'un ami. Ce que veut un professionnel à une épave comme moi, excellente question… Je ne compte pas attendre qu'il me le dise. Il me sous-estime sûrement – il faudrait être con pour ne pas le faire –, c'est mon atout. Comme toujours.
Un bar, plus loin. Si je n'étais pas un tel connard, je pourrais y trouver de l'aide ; mais je n'ai aucun allié, ici. Je rentre quand même. J'ignore les regards machinalement envoyés par les clients, et l'odeur qui m'accueille. Rance. Répugnante. Familière. Me voilà dans mon élément, comme un déchet dans sa poubelle. Pourtant, je ne suis pas venu pour boire ou chercher un sale boulot à exécuter : le Diable s'est occupé de m'en envoyer, trop impatient d'élargir sa foutue collection d'enfoirés. Je me colle au mur juste à côté de l'entrée ; je veux voir ce mec entrer et me chercher du regard. Observer ce dernier quand il croise le mien, deviner ses intentions. Il n'osera rien faire ici… Peut-être même qu'il n'entrera pas. Hell, je ne peux qu'espérer voir sa gueule : s'il se barre, j'aurai toujours un putain de scorpion dans la botte, prêt à me sauter dessus…
J'ai déjà trop d'épées de Damoclès dans ma putain d'existence.