Le bruit de tes semelles usées raclant les sols nouvellement créés de l’Arche et la fumée de la cigarette t’entourant pour seuls compagnons, tu avances dans ces couloirs inconnus, à la recherche d’une porte que tu pensais ne jamais rouvrir — un portail menant à l’enfer et des souvenirs que tu pensais avoir oubliés eux aussi (un combat médiocre qui t’avait tiré de tes pensées (et une innocence qui s’en était prise à toutes et tous, ne laissant derrière elle que désolation et cendres (non pas que cela t’atteigne en vérité, la mort fait partie de ton quotidien et à part un soupir las tu ne saurais laissé transparaître la moindre émotion en la donnant (non, vraiment, ce n’était qu’une mission comme une autre, raison pour laquelle tu l’avais oubliée (mais les choses ne disparaissent jamais vraiment, tu le sais ça maintenant (et même les villes détruites reviennent un jour ou l’autre)))))). Une mission, encore, une chose anodine à accomplir un jour de plus jusqu’à ce que ( ). Une mission simple, un train hanté et une innocence à la clé, rien de surprenant ou de déroutant, un ordre comme un autre et c’est justement ce qui t’interpelle. Les temps n’ont rien de normaux maintenant — les accords tacites ont été rompus (en une invasion profane et destructrice), les marques laissées ont été marquées au fer rouge (larmes de goudron qui roulaient sur leurs joues (et chacune d’elles venaient nourrir ta colère (tu n’as rien à faire des Souvenirs, mais ils l’avaient faite pleurer elle et c’est là le plus grand des outrages))), les pertes ont été trop grandes (le Berger n’est plus et vous voilà perdus) — alors pourquoi continuer de prétendre ? Pourquoi continuer de donner des ordres et de les exécuter, comme s’ils allaient réparer les cœurs brisés, inverser le cour du temps et ramener le Prince parmi ses sujets. Toi qui ne comprends les émotions, tu es perdu au milieu d’un tel capharnaüm. Ont-ils besoin de normalité ? D’une routine monotone pour continuer de se mentir, continuer une Guerre qu’ils ont de toute évidence perdue, par accident — à moins qu’il n’ait décidé de partir, lui et ses lubies, abandonnant ses soldats à leur triste sort, désertant le champs de bataille pour reprendre autre part, repartir de zéro, libéré de ses chaînes (oh s’ils savaient ce que tu penses sans doute ne serais tu plus ici pour le faire (mais c’est là ta dernière des libertés (et tant que ton visage continuera de ne rien exprimer sans doute seras tu en sécurité (enfin)))). Le bruit de tes semelles abîmées et la fumée. Ta moue habituelle, mélange de lassitude et de fatigue — et cette étincelle éteinte dans le regard, cette promesse d’une violence décuplée à la moindre contrariété. Tu avances dans les couloirs de l’Arche, Sebastian, vieux pantin bientôt rouillé par cette monotonie, et arrive enfin jusque la porte tant cherchée. Elle est plus belle que dans tes souvenirs, plus neuves aussi, sans doute est-ce grâce à votre déménagement impromptu — les choses ont été refaites par l’Amour, est-ce pour cette raison que les traumatismes ont été balayés d’un revers de la main ? Il ne te reste plus qu’à attendre, quelques secondes à peine tu espères, que ta partenaire te rejoigne. Toi qui aimes tant la solitude tu es aujourd’hui affublé d’une autre machine — et des souvenirs vagues de celles ayant déjà partagé tes missions te reviennent (espérons simplement que tout se passera bien aujourd’hui) — qui, semble t’il, est en retard (ou étais tu en avances, pour une fois (le temps est une chose complexe qui t’échappe depuis longtemps)). Alors, une nouvelle cigarette et, dans le silence, la fumée âcre qui s’envole. |
GASMASK |
Moving up and taught I'm a weapon (Ghost Train) || Emi
Re: Moving up and taught I'm a weapon (Ghost Train) || Emi
Oui, Emi tente de s'en persuader.
L'ordre a été donné. Détruire une Innocence, un train fantôme. Une bien belle mission. Est-ce vraiment le moment de l'accomplir ? Pourquoi continuer à agir, à suivre les directives d'un homme qui a disparu, qui est parti, abandonnant les Noé derrière lui ? Quelle hypocrisie. C'est futile, ridicule. Ne pouvait-il par leur donner mot ? Leur expliquer ce comportement imprévisible ? Ils ont tous pleuré, les marionnettistes, les instruments eux, sont restés impassibles. Tous savent qu'ils en sont là à cause de lui, le Comte Millénaire est le responsable de leurs drames.
Et maintenant qu'il n'est plus là, vers qui la haine qu'elle ressent doit être dirigée ? Les exorcistes. Uniquement eux. Non. Le monde aussi. Emi exècre du plus profond de son être ses ennemis. Qu'ils périssent tous de sa lame, de ses mains comprimant leur gorge. Et même s'ils viennent à la supplier du regard, elle n'aura aucun égard. Les machines ne sont pas pourvues de sentiments, du moins, pas envers ceux qu'elles méprisent.
Ah... Heureusement que Lily ne l'a jamais vue ainsi, elle en serait dégoûtée.
Le temps n'est plus à la paresse et aux réflexions. Emi se redresse, silhouette aux vêtements sombres, à l'armure enfilée. Déjà prête à partir. Il lui suffit de se rendre devant la bonne porte, l'Arche est immense et les couloirs s'enchaînent, fourmilière dans laquelle ils circulent. Il ne lui faut que peu de temps pour trouver son chemin, rejoindre le bon endroit. A son étonnement, elle n'est pas la première.
Emi s'approche de la porte, de son compatriote. Ses talons résonnent, s'arrêtent lorsqu'elle est à proximité. D'un geste de main, elle dégage la fumée, intoxiquant ses poumons, n'ayant jamais aimé cette odeur. Sa main vient se poser sur sa hanche, ses yeux se posent vers les siens, fatigués, comme toujours.
Simple politesse énoncée. Emi tourne la tête vers la porte, sa main se pose sur la poignée, ne désirant pas perdre plus de leur temps, avec cette tâche. Autant vite s'en débarrasser et revenir ici, le plus tôt possible. Elle est de mauvaise humeur, son sourire ne se perd pas sur son visage, il ne s'étire pas. Toujours ce calme persistant qui ne se défait pas de sa personne.
La porte poussée, le manteau de la nuit recouvre le ciel d'Angleterre. Quelques pas, Emi observe l'endroit, les ruines d'un combat si loin et pourtant si marquant... Elle secoue la tête pour ne pas se perdre dans ses pensées, avance vers la gare qui sera leur destination. Les coups de minuit ne sont pas si près de retentir, ils ont le temps d'arriver là-bas et d'observer les lieux. Des lieux qu'elle se remémore. Une grimace apparaît, un grognement.
S'il s'agit bien d'une Innocence et qu'elle est dotée de conscience, c'est une sacrée ordure.agora
Re: Moving up and taught I'm a weapon (Ghost Train) || Emi
Sabah
et le Comte a disparu
comme ça
comme le brouillard qui se dissipe au matin
comme le papillon qui s'envole toujours trop loin
comme un éclat de verre cassé qui glisse sous le meuble
il était là et puis
plus rien
et maintenant
c'est le vide en ton sein.
†
Cependant la Guerre n'attend pas Sabah
tu le sais
la Guerre n'attend jamais
et tu ne sais pas comment tout s'organise encore
alors que le pilier central manque à l'appel
ni comment on réussit à déléguer
et déléguer
et pourtant personne ne sait vraiment
mais on t'envoie sur le terrain Sabah
là où tu te feras la plus utile
en aide à tes chers akumas
oh comme tu les aimes oui
avec toi
plus aucune triste machine ne fléchira
tu me le promets et
je te le promets
alors
tu traverses le portail qui t'amène au beau milieu de la scène
et tu siffles gaiement :
— Sebastian Abbott, changement de programme : tu es mandaté de toute urgence sur une autre mission, prend donc la porte de laquelle je viens... quant à toi, Emi, tu laisses un temps en suspens : « Enchantée, je m'appelle Sabah, et je serai ta co-équipière aujourd'hui ; tu verras, on va bien s'amuser ! »
Tu admires Emi un instant
sublime machine
soldat mécanique
(chair à canon)
et quand je dis que je te sens ravie
tu l'es
vraiment
mais quelque part
ce qui ne sera jamais
(terrible destin)
ça te comprime le coeur
et tu dis
ce n'est pas juste
ce n'est pas juste
ce n'est pas juste
et pour ton frère
et pour eux
et pour elles
mais tu ne peux pas le crier
ni même le chuchoter
alors tu ravales tes éclats d'émoi et
tu glisses quelques mots à propos de la mission à remplir :
— Un train mystérieux, hmm... c'est une jolie histoire, mais tu sais, j'y étais, ce jour-là... et si fantômes il y a : crois-moi, they wouldn't be this kind.
†
Re: Moving up and taught I'm a weapon (Ghost Train) || Emi
Enfin, cela aurait pu être pire, si sa partenaire avait été Adelheid par exemple.
Sublime machine bien trop docile et paisible. Elle est le calme avant la tempête, elle n’a pas encore laissé éclater ses émotions. Non, elle se moque de tout, pour le moment. D’avoir été abusée, jetée, déçue, attristée. Elle s’en fiche d'avoir été le jouet d’un Noé pendant bien trop d’années. Il n’y a que Raeliana qui est digne d’être à ses côtés, de lui ordonner, de la diriger. Le reste n’est bon qu’à trahir et se servir de sa personne sous prétexte qu’elle a cessé d’exister. Triste éternité.
Un soupir franchit ses lèvres à moitié closes, son regard ambré fixe la belle femme à ses côtés. Peut-être oublie t-elle qu’elle n’était pas la seule présente, qu’Emi aussi a assisté à ce carnage, ce combat ressemblant davantage à un massacre, qu’elle était en première ligne, hurlant de rage, criant de colère, s’arrachant les poumons à chaque coup qu’elle infligeait, recevait. Ils ont gagné. Cependant, ce n’était pas une victoire. Il suffisait de baisser le regard vers les cadavres pour s’en rendre compte.
Bien qu’elle ne croit pas aux esprits surnaturels, aux revenants et aux morts-vivants, l’Innocence est capable de façonner bien des idées.
Re: Moving up and taught I'm a weapon (Ghost Train) || Emi
quel est le Souvenir de Noé qui fourmille sous ta peau
car tu en as bien hérité d'un
et sacré héritage que celui-là !
avec toi sous l'épiderme un pan de l'Histoire tout entier celle que tout le monde préférerait oublier
mais qui es-tu Sabah si tu n'es plus
l'énième Incarnation de la Déchéance ?
car je suis toi et tu es moi
et tu es elle car elle c'est moi
il n'y a pas vraiment de gagnant à ce jeu-là
mais des perdants ah ça (...)
tu regardes Emi jolie statue de marbre
sage comme une icône
tu sens les flots s'abattre derrière le doux visage
ils sont bien cachés tu n'en sens même pas les remous
quelques goutes d'eau qui se jettent sur les joues
tu l'imagines en tout cas tu sais que c'est toujours comme ça
et elle te parle des fantômes
tu aimes bien son état d'esprit
prête à tout écraser comme de la purée
oh Emi
tu as bien raison
il n'y a plus de temps pour les regrets ou l'hésitation
c'est un temps révolu
celui de la mort des machines et de la victoire absolue
elle te demande ton avis d'une bien curieuse façon
de celles qui te hérissent un peu les poils sur les bras
— Hah, quoi... un outil ? tu fronces les sourcils tu ne sais pas par quoi débuter ce n'est pas quelque chose que tu aimes entendre ça ça te rappelle des mauvais souvenirs : « Non, c'est de ma faute, j'aurais du commencer par-là : par pitié, pas de ça avec moi ; vous n'êtes pas que de simples armes de guerre, vous avez une âme, c'est suffisant pour moi ».
tu sais moi j'ai un frère
aujourd'hui il est un peu comme toi
triste akuma
alors je n'aime pas vraiment ces mots-là
je crois
— Commençons par le commencement... en attendant le train, inspectons.
tu as les nerfs qui grouillent d'excitation
tu ne l'attends pas tu emboites le pas à ton ombre
un train fantôme, hein ?
et la nuit qui se fait de plus en plus grande
minuit sera bien trop vite là
autant visiter un peu les lieux
enfin
les ruines
devrais-je dire.
†
Re: Moving up and taught I'm a weapon (Ghost Train) || Emi
Son expression laisse apercevoir le dégoût, la rancœur, l'ironie. Une âme emprisonnée par la malédiction du Comte. Estime-t-elle qu'elle est noble et respectable ? Mérite-t-elle d'être considérée ? Non, loin de là. Agir ainsi, c'est agir par pitié. Et Emi n'a pas besoin de ça.
On n'attend pas d'un chien de combat qu'il épargne son adversaire. Plus il le déchiquettera, mieux ce sera.
Sabah semble avoir oublié une réalité et Emi n'est pas assez tendre pour lui épargner sa vision du monde. Elle ne sait pas mâcher ses mots.
Tu sais, moi j'avais un frère. Il n'a pas eu de chance, il n'est plus de ce monde, il a été tué. Ou plutôt, je l'ai tué. Ma sœur, mes parents aussi… Maintenant, je patiente jusqu’au jour où je serai tuée.
L'ordre est donné. Emi acquiesce d'un geste de tête et s'avance dans les rues de la ville d'Edimbourg. Sous ses pieds, les gravats s'écrasent, son regard fixe les vestiges de l'endroit qui n'a jamais été reconstruit. Une ville fantôme, c'est littéralement le cas. Il n'y a pas d'âme qui vive si ce n'est la leur.
Emi observe les alentours, rien. Elle s'approche près du quai, ce qu'il en reste et demeure silencieuse. Il n’y a pas un son, pas une présence dans l’air. Pas de chiens errants ni d’oiseaux. C’est complètement mort.
Ce soir, elles seront les seules passagères.
Pleine lune, c’est bientôt l'heure. Il n'y a qu'à attendre et détruire ce phénomène après l'avoir compris. C’est ce qu’on leur a demandé de faire bien qu’elle préfère trancher ce train sans se donner la peine d’identifier la cause des disparitions. Elle est trop accablée pour se prêter au jeu du détective.
agora