(not even me)
Enfin, à vrai dire, tout se ressemble en ce bas monde, à tes yeux.
Peut-être est-ce cela que tu devrais changer — tes yeux
Car peu importe la manière dont tu t’y prends, ils te renvoient toujours une image sombre et terne du monde. Sans joie ni la moindre gaieté, rien pour te sortir de l’anesthésie qui frappe tes sentiments depuis — tu crois (tu crois mal, ô Pilar (si tu savais)) — que tu es venu au monde. Le souvenir t’arrache une grimace sur ton visage d’ordinaire si neutre qu’il en devient désobligeant dans la haute ; grimace que tu chasses bien vite lorsque quelque chose, ou plutôt quelqu’un, attire ton attention.
« Driver please, stop the carriage! I think we’re here, »
Évidemment, c’est faux
Tu n’as pas la moindre idée de l’endroit où vous vous arrêtez mais peu importe — les choses qui attirent ton attention sont bien trop peu nombreuses pour passer à côté de l’une d’entre elles. Tant pis pour ton rendez-vous, il pourra attendre ou ré-essayer.
Tu jettes quelques pièces à l’homme qui t’a généreusement conduit jusqu’ici et cédé à ton caprice, et tandis que tu réajustes ton manteau, tu jettes un regard distrait sur le papier logé au fond de l’une de tes poches
Et là, tes yeux s’arrondissent
Tu ne crois ni au hasard ni au destin
(tout est le fait des hommes tu le sais bien)
mais si quelconque là-haut cherchait à t’en convaincre
il n’a pas lésiné sur les moyens :
tu te trouves exactement
là où tu devrais (devais) être
et tu te dis que cette étendue de verdure
et la petite silhouette qui trône en son centre
chevalet devant elle et pinceau à la main
ne peut-être que celle que tu dois rencontrer ce matin
tu t’avances vers elle les mains dans les poches et lorsque tu arrives à sa hauteur enfin ce n’est pas elle que tu regardes c’est
ce qu’elle peint
tu ne ressens rien
ni pour elle ni pour son dessin
son essai
tu ne sais pas
mais tu veux comprendre
« You must be Anja ? Nice to meet you, I’m Pilar. »
Well, it’s never really nice
to meet anyone or
anything, really
but sometimes
you wish it were