sometimes you think that you want to disappear but all you really want is to be found — maisie

Et le temps passe, doucement et sûrement ; une menace ? une vérité ? que sais-je, mais il passe, sans s'arrêter. Maisie se sentait parfois à l'étroit entre les murs du château alors qu'il était si grand, quelle contradiction. Elle passait son temps dans les villages avoisinants pour donner un coup de pouce aux locaux notamment. Il lui fallait des livres et des médicaments pour avancer dans ses recherches. Et puis, il fallait se l'avouer, être dans un village, entouré d'habitants lui rappelait chez elle. Aussi positif que négatif. Elle se souvenait des soirées dansantes, des jeux avec les enfants mais elle se souvenait aussi des regards, des jugements et des chuchotements (et ça la terrifiait encore). Mais ce n'était pas grave, ils n'étaient pas là et elle avait l'habitude ; les regards n'étaient que des actions passives, tout allait bien. Le temps passe, doucement et sûrement ; et parfois, rien ne change.

Maisie attrapa son sac et s'absenta de la grande bâtisse, sans oublier de prévenir ses amis. Ils s'inquiéteront, comme à leur habitude, même si elle les rassurait. Ils ne seraient jamais rassurés.  Peu importe ce qu'il allait se passer. Elle s'éclipsa dans une ville, un peu plus loin cette fois. Les ailes de la liberté, poussées dans son dos; la rousse semblait pouvoir aller toujours loin. Elle avait de la chance, elle était invisible, elle n'était pas combattante, elle ne servait pas à grand chose ; dans son inutilité, elle avait de la chance. Elle n'avait pas de cible derrière le dos; et pour que ses amis soient saufs, elle prenait des précautions ; elle était seule, tout irait bien. Elle serait ignorée, comme à chaque fois, il n'y avait pas de problème. Ce n'était pas grave, elle pourrait se procurer plus d'ouvrages, elle pourrait faire ses recherches ; n'ayez crainte, elle sera utile.

Et puis, elle était là, au milieu des enfants; sans s'en rendre compte, elle s'était mêlée à eux, comme avant, comme si hier et aujourd'hui n'existaient pas, qu'elle était de retour chez elle. Ses affaires posées sur un banc à côté, elle s'amusait avec eux, avec sa bienveillance naturelle et son grand sourire chaleureux. Un peu de musique et ils dansaient tous ensemble ; elle n'était pas d'ici, elle était plus âgée qu'eux, cela se voyait, elle ne s'en cachait pas. Mais elle aimait leur sourire sur leurs visages, comme si les malheurs n'existaient plus le temps d'un existant ; petite fille n'a jamais grandi, dans son coeur. Elle retrouvait son bonheur dans les choses simples, dans une simple danse ; et parfois, les enfants ne sont plus là et il n'y a qu'elle sur cette place, et parfois ils sont de nouveau avec elle, et ils étaient là, ensembles.

Mais l'écossaise avait ses sens de plus en plus affutés, elle avait senti un regard sur elle et sur les enfants; un parent inquiet peut-être ? Et tout en dansant, ses yeux se baladaient pour trouver la personne qui l'observait, et son regard tomba sur celui qui l'observait. Elle ne savait pas trop ce qu'il se dégageait de ce regard mais une chose était sûre : des mesures étaient à prendre. Et la demoiselle s'approcha de l'homme, tout en continuant à danser comme les enfants, alors qu'elle quittait le groupe quelques instants. Son sourire chaleureux toujours figé sur son visage, elle posa les yeux sur celui qui les regardait et elle lui tendit la main, arrivée à son niveau. Voulez-vous vous joindre à nous, monsieur ? Une invitation, en premier lieu ; elle n'oserait pas le tirer avec elle (pas tout de suite), voulez-vous danser avec eux ? Une invitation, en premier lieu ; pour ne brusquer personne, pour seulement montrer, observer c'était bien, se mêler aidait, parfois, à mieux comprendre ce qu'on observait.

Des pas de danse assurés, assumés, Maisie tournoyait autour des enfants ; ils dansaient avec elle, bien trop contents qu'une adulte vienne jouer avec eux. Elle se sentait à l'aise, libre de pouvoir danser et leur donner le sourire sans artifices. Etait-ce la liberté ? De pouvoir tournoyer, de pouvoir danser, le vent dans les cheveux, sans s'inquiéter de ce qu'il va se passer. Une bouffée d'air frais, un semblant de liberté, oui. Et elle pouvait continuer pendant des heures, mais non, elle ne pouvait se permettre de rester trop longtemps ; il n'était pas question d'inquiéter ces amis qui l'attendaient à la maison. Cela dit, elle fut intriguée par le jeune homme qui les regardaient. Elle aimait mettre du piquant, de la douceur dans la vie des gens. Et peut-être que ce jeune homme avait besoin de piquant ou de douceur dans sa vie, elle ne savait pas, mais c'était elle, vous savez ; elle aimait donner le sourire. Alors elle s'était avancée, tendant la main ; ô elle n'était pas folle, elle avait l'espoir mais elle savait qu'il n'allait pas prendre sa main, il ne devait pas être plus jeune qu'elle, il était prudent (lui).

Maisie ne fut absolument offusquée lorsqu'il mangea un morceau avant de lui répondre, elle était polie, elle attendait, son grand sourire affiché sur son visage ; ce n'était pas la première réponse négative qu'elle se prenait, c'était dommage mais ce n'était pas grave. Elle allait réessayer de toute façon. Oh, pensait-il qu'elle se sentait gênée par son regard ? Si c'était le cas, elle le rassurerait bien vite. Pragmatique, il lui répondait avec des faits, elle sentait. Observer lui suffisait ? Hm, elle n'était pas d'accord avec cette approche, même si elle ne savait pas du tout que son interlocuteur était un pro de l'observation, comme l'exigeait sa vie, son "métier". Elle baissa les yeux sur son petit déjeuner, qui était appétissant il fallait bien l'avouer, avant de relever ses yeux pour le regarder, penchant un peu sa tête sur le côté.

You don't dance, good sir ? Les enfants continuaient à jouer derrière, une d'entre eux arrivant à la hauteur de Maisie pour qu'elle revienne jouer avec eux ;  Are you not bored just observing  ? Elle était vraiment curieuse, ô si elle savait ; elle voulait vraiment savoir. La docteur s'ennuierait tellement si elle ne devait qu'observer, elle avait besoin d'intervenir, de ressentir, de se sentir en vie, elle ne saurait même pas expliquer pourquoi, c'était comme ça. Peut-être était-ce son caractère, son histoire, elle ne saurait dire ; elle avait besoin de se sentir en vie, d'être libre comme l'air, comme ses cheveux dansant dans le vent. Et justement, la vie ne tient qu'à un fil, si fin depuis son entrée chez les pacificateurs, alors autant en profiter jusqu'au bout, comme danser avec les enfants, elle avait l'habitude des regards; le jugement, l'écœurement, mais elle ne voyait rien dans son regard, et d'un côté, ça lui faisait plaisir.

By the way, I'm not worried ! Your eyes don't scare me, good sir. Et puis, elle n'était pas d'ici. Il partirait, et elle ne le reverrait surement jamais. Physical exercice is good for the body, you know. Aaaaand, a little dance won't hurt. I mean, I won't hurt you I swear ! Lui disait-elle avec un grand sourire sur le visage ; parfois les gens pouvaient se demander si Maisie n'était pas restée enfant, si elle n'avait pas le syndrome de Peter Pan ; mais non, elle était juste un peu trop chaleureuse, elle ne souhaitait du mal à personne, elle était juste un peu lourde, c'était juste ça. Mais elle n'était pas méchante vraiment, et quelle pipelette elle faisait. L'enfant près d'elle hochait la tête à chaque parole qu'elle disait, voulant aussi que le jeune homme les rejoigne pour une petite danse. We won't hurt you sir, we're kind! conclut la petite fille, mimant Maisie.

Oh, si la douce docteur savait. Elle entendit un rire venant du jeune homme, se moquait-il d'elle ? Peut-être, peut-être pas. Elle ne prêtait aucune mauvaise intention à qui que ce soit. Mais si la douce docteur savait, quelle ironie, de lui poser cette question alors qu'il s'agit de son travail ; de sa raison d'être, de faire ? Une nouvelle fois, elle ne prêtait aucune mauvaise intention, elle ne portait aucun jugement alors ce rire ? Qu'en pensait-elle ? Un doux son à l'oreille, c'était tout. C'était magnifique, d'entendre un rire. Si léger, donnant tant de joie dans le coeur. Elle aimait entendre rire, elle aimait penser qu'un jour heureux pouvait tant guérir. Et ce rire, peu importe sa signification, lui faisait plaisir, car un rire, son rire, ne disait pas non, ne fermait pas de porte. Si Maisie savait, ô si elle savait. Parfois, ne pas savoir avait du bon. Parfois, ne pas savoir permettait une certaine légèreté dans les propos, les sentiments. Parfois, ne pas savoir était une bénédiction.

La demoiselle était bien insistante, il fallait bien l'avouer et elle n'aurait aucun mal à l'assumer. Elle soutenait son regard, sans aucune peur ; et son regard faisait bien vide en le comparant à celui de Maisie, toujours pétillant, toujours trop pétillant. Si elle représentait l'excès, il représenterait la retenue (le vide, disons le plutôt, pour ceux qui savent (qui sait ?)). Parfois, ne pas réfléchir, être un peu simple d'esprit faisait du bien. Ô, ne vous méprenez pas, Maisie était loin d'être simple d'esprit. Elle ne se faisait pas si facilement avoir, les apparences sont trompeuses, aussi bien la concernant que concernant ce jeune homme. Tout ce que la douce docteur pourrait dire c'était qu'elle trouvait les yeux de son interlocuteur magnifique, d'un bleu qui avait peut-être perdu de sa lumière, mais ils restaient magnifiques. Et il y avait de la beauté dans tout ; un regard éteint n'était pas moins beau qu'un regard brillant. Et c'était ce que pensait la demoiselle. Maisie était bien des choses, tout le monde en conviendrait facilement, mais elle n'était personne pour s'immiscer dans ce qui ne la regardait pas ; elle voyait, remarquait, observait mais qui était-elle pour demander ce qui était arrivé à son interlocuteur pour qu'il ait un regard si éteint ? Son regard était, à ses yeux, loin d'être vide, parce qu'il y avait toujours quelque chose à voir, dans chaque regard.

Et puis, comme peut-être attiré par l'illusion d'un instant de légèreté, de liberté, l'insistance de Maisie avait payé. Une première victoire, c'était ce qu'elle pourrait célébrer avec les enfants. Et une pensée lui traversa l'esprit alors qu'il lui répondit ; comment pouvait-il lui faire un sourire, qui lui semblait si chaleureux, après qu'elle ait remarqué son regard ? Bon, c'était ce qui lui traversa l'esprit, et une seconde plus tard, elle écarta cette question pour lui répondre, et surtout, pour le rassurer, d'une certaine manière. En avait-il réellement besoin? They will be the judge of that. I won't judge you. Besides who cares about good we are ? Let's have fun, good sir. It's all that matters ! lui dit-elle, montrant les enfants en faisant un léger coup de tête vers eux. Maisie dansait parce qu'elle aimait ça, elle se fichait de l'opinion des autres, seulement peut être écoutait-elle les enfants, à la rigueur. Well, good sir, it would be my honour to show you. I'm sure you'll outperfom me in no time! Et avec toute la grâce dont elle pouvait faire preuve, la docteur s'inclina doucement devant le jeune homme, un grand sourire aux yeux, comme si elle le saluait, avant de se mettre à danser avec la petite fille, la musique un peu lointaine. Et une pirouette plus tard, l'enfant qui l'accompagnait s'inclina devant lui avant de reculer pour rejoindre les autres enfants, comme si le premier acte était terminé. Quant à la docteur, elle tourna une fois ou deux avant de s'incliner à son tour devant lui et de lui tendre la main. It's like... jumping, you know ? Like taking a leap of faith! You have the guts, I can tell! Des mots d'encouragements, et un petit rire s'échappant de ses lèvres. Don't be afraid, just follow my lead, il n'y avait pas à avoir peur du ridicule, il ne tuait pas, n'est-ce-pas ?