Ramenant une nouvelle mèche dans son chignon à moitié défait, l’Art râle et bougonne. Il n’apprécie guère ces cheveux trop longs et souhaiterait bien les couper mais qui sait comment son hôte réagirait. Il a enfin acquis sa confiance et son affection, il ne peut se permettre de gâcher une telle chose. Alors il se contente de râler et de les attacher, non sans se rappeler l’époque où il était un homme. Tout était si simple, beaucoup plus simple. Il en serait presque nostalgique. Non pas Il, tu. Car tu es toi. Car enfin, enfin, tu es celui aux commandes. Car, enfin, le regard qui se pose sur ce monde est le tien. Tu, car tu es toi, Souvenir de l’Art, tout en force et en fierté, soldat accompli d’une guerre que tu comptes bien gagner. Tu, car ces os qui ont craqués, ces os qui se sont ressoudés, ces entrailles qui ont morflé, cette peau qui s’est refermée, ces blessures qui ont disparu, tout cela était à toi – tout cela était le résultat de tes choix (combats (erreurs)). Tu, car tu es Toi – Tu, car Lily n’est plus. Alors tu souris, Ars, comme tu n’avais plus souris depuis longtemps – c’est que voyez vous, le Souvenir est souvent maussade et ronchon (mais jamais il ne l’avouera (c’est que voyez vous, le souvenir est fier et gonflé d’orgueil (mais jamais il ne l’avouera (c’est que, voyez vous)))) – et tu marches la tête haute au milieu de ces humains que tu exècres. Pas un seul ne semble avoir de valeur à tes yeux, ce ne sont que des inconvenances dans ton quotidien, des petites choses dont il va falloir se débarrasser bien vite – pour faire un monde plus beau, un monde parfait où vous serez Rois. Tu souris et tu avances d’un pas rapide, là où l’innocence aurait été vue. Maintenant que tu as les choses en main – dans tes mains – alors il faut en profiter. Laisser de côté les hésitations et les sentiments de l’Enfant de la Lune et partir combattre le camp ennemi. Détruire cette innocence (mensonge (horreur (monstre (haine (dégoût (pêché)))))) et faire gagner ta famille. Tu as soif de victoire et, bien trop confiant en tes capacités, n’as conscience des dangers que tu encours. Tu t’en moques bien, en vérité, car une innocence est une innocence et doit donc être détruite. Car un bon exorciste est un exorciste mort et que, de toute façon, un Noah ne peut disparaître puisqu’il est, au fond, un peu divin. Car, en plus, tu fais tout cela pour une bonne raison, pour protéger les tiens et pour protéger Lily – la douce Lily (trop gentille Lily (imbécile Lily (ton âme sœur))) – de toutes ces horreurs qu’elle n’a la force d’affronter mais également d’un danger trop proche de sa maison et de son fils. Oh son fils, voilà un autre sujet qui rajoute un peu de disgrâce sur ton visage, le temps d’une grimace de dégoût. Tu ne saurais expliquer ton ressenti face au petit Oliver et ne comptes pas le faire – quiconque te posant la question fera face à tes foudres sans plus de sommation – mais le bout d’homme te trouble. Le bout d’homme qui, pendant une seconde, te fait oublier ta mission. Heureusement, la jeune fille compatible apparaît dans ton champs de vision. Oh tu ne sais que c’est elle réellement, puisque tu ne l’as jamais rencontrée et ne la connais pas. Mais tu sais que c’est elle, car tout ton sang bouillonne en sentant le cristal divin – l’Art est paradoxe (l’Art est enquiquinant) – et la rage vient dessiner un sourire bien peu gracieux sur ton visage. Toi qui aimes les choses élégantes et les manières correctes, tu hésites un instant à l’interpeller et lui faire la conversation. Le plus simple serait encore de l’abattre là, comme ça, sur le champs, sans chercher plus longtemps à savoir ou comprendre. Le plus simple serait de faire les choses rapidement pour pouvoir repartir en mission – profiter de cette liberté merveilleuse (le Souvenir est ivre de liberté). Mais le plus simple serait si ennuyeux. Alors tu fais taire ces envies, assagies ce sourire et t’éclaircis la voix. « Qu’est-ce qu’une innocence vient faire par ici ? » demandes tu d’une voix forte, bien différente de celle de ton hôte « J’espère que vous n’avez pas l’intention de reproduire les horreurs d’Édimbourg, ce serait bien peu courtois. » Tu soupires théâtralement, une main ramenée contre ton front alors que dans l’autre apparaît une longue épée noire – dessinée un peu plus tôt. « Ah la la, vous ne me laissez aucun choix Mademoiselle, je ne peux rester de marbre alors qu’un cristal divin s’apprête à détruire une aussi jolie ville. » Puis, tendant ton arme devant toi, tu lui adresses un sourire sincère – l’Apôtre cabotine sans cesse mais est sérieux au fond et il respecte ses ennemis – avant de prendre une dernière fois la parole « En garde, donc. »Et d’attaquer. |
GASMASK |
- HRP:
- Le Vieux casse les pieds en #996699