make a very beautiful life for us, no matter what it takes | Ayden

Ca y est. Elle va s'en aller.

Cette décision n'avait rien de facile, mais elle l'avait tout de même prise. Elle savait qu'elle ne pouvait plus rester sans rien faire, qu'elle ne pouvait plus rester les bras croisés à subir cette Guerre avec sa famille. Elle ne pouvait plus fuir Saphira, elle ne supportait pas de subir les coups du destin. Elle devait faire quelque chose, agir pour que tout cela s'arrête. Parce qu'elle savait que ce n'était pas en attendant que la Guerre allait terminer. Si elle ne faisait rien, la Guerre la pourchasserait, à jamais et elle devrait vivre toute sa vie dans l'exil et la peur.

Il en était hors de question.

Et puis, il n'était pas question d'elle seulement. Dans son exil, elle avait également entraîné son père, sa mère et son frère. Eux aussi allaient devoir vivre dans la peur jusqu'à la fin de leurs vies? Hors de question. Il en était hors de question.

Alors Maisie l'avait trouvée et lui avait parlé de ce groupe, les Pacificateurs. Ceux qui luttent pour la paix et pour que la Guerre s'arrête. Et cela lui était apparu comme une évidence. Elle ne savait pas Saphira, elle était isolée de tout ce qui concernait l'Ordre Noir alors elle ne savait pas que d'autres, comme elle, avaient fuit. Pour d'autres raisons, très certainement, mais jamais elle n'aurait pensé ne pas être seule. Et le mieux -ou le pire- dans tout cela, c'est qu'ils étaient prêts à l'accueillir. Ils en avaient discuté ensemble et ils avaient une place pour elle, pour Saphira Hyde, pour Saphira l'exilée, l'ancienne Exorciste, pour Saphira et Brave, pour le petit papillon perdu.

Ce fut si dur de convaincre son père de la laisser partir sans trop lui dire sur ce groupe. Maisie l'avait beaucoup fait rire, comme d'habitude mais son amie et elle avaient réussi à se montrer convaincante. Plus que tout, Saphira était persuadée que les Pacificateurs étaient la solution pour sauver sa famille et plus globalement, sauver le monde.

Plus que tout, ça la déchirait de devoir laisser sa famille derrière elle, à nouveau. Elle avait l'impression de revivre son scénario de départ à la Congrégation. Mais non, c'était différent. Parce qu'aujourd'hui, elle avait grandi, aujourd'hui, elle savait exactement ce qu'elle faisait. La fuite l'avait rendue plus méfiante, la Guerre l'avait détruite un peu. Elle sait que si elle est encore en vie actuellement, c'est grâce à son père. Il l'a sauvée de tellement de choses et a toujours été son point d'amarrage lorsqu'elle se perdait dans la mer de ses ténèbres. C'est grâce à lui qu'elle s'est reconstruite, grâce à lui qu'elle peut encore sourire aujourd'hui.

Alors ça la tue de devoir lui mentir et de le laisser derrière elle, mais elle doit le faire.
C'est avec un gros poids au ventre et la tête pleine d'interrogations qu'elle s'était rendue dans sa chambre dans ce grand manoir pour préparer ses affaires. Elle n'avait pas grand-chose, après tout cela ne faisait même pas un mois qu'elle était ici. Elle ouvrit son armoire et prit un sac, qu'elle posa sur son sac et ouvrit. Elle repliait ses vêtements et commencait déjà à les mettre dans ce sac qui allait désormais contenir une petite partie de sa vie.

Elle partit s'asseoir un instant sur son lit, silencieuse. Tellement de questions remplissaient son esprit. Et maintenant? Qu'allait-il se passer? Depuis sa fuite, son avenir était incertain. Son regard se perdait dans le paysage de la fenêtre face à elle. Décidément, cette Guerre l'avait tellement changée.

Revenue à elle, le papillon tourna la tête et aperçut une photo sur sa table de nuit. S'approchant un peu plus, elle la saisit entre ses doigts fins -ses doigts de ce corps qui avait tant souffert- et l'observa. C'était une photo de sa famille, une photo d'elle, de sa mère, de son frère et de son père. Une photo d'eux avant la Guerre. Avant qu'Elle n'arrache tout, avant qu'Elle ne leur prenne tout, avant qu'Elle ne tente de les dresser les uns contre les autres, avant qu'Elle ne tente de les séparer.

Saphira admirait les visages dans ce cadre, un léger sourire se formant sur son visage sans qu'elle ne s'en rende compte. Ils étaient les seules personnes pour qui son coeur battait encore, les seuls pour qui elle ferait tout, pour qui elle se sacrifierait sans hésiter.

Et une nouvelle fois, elle se sacrifierait pour eux.

Dans ce silence, il n'y avait qu'elle, ce sac, cette photo, les oiseaux qui chantaient dehors.
c'était sa dernière journée avant son départ.

En contemplant cette photo, son coeur se serrait. Ou alors battait-il encore plus vite? Elle ne savait pas. La décision qu'elle avait prise n'avait rien de facile, rien de simple. Devoir quitter sa famille, la laisser derrière elle alors qu'elle s'est battue durant des mois pour la retrouver... c'était si dur. Mais en soi, elle ne la laissait pas vraiment derrière. Parce que ça serait grâce à eux qu'elle avancerait, comme elle a toujours avancé, en regardant droit devant. En évitant de regarder en arrière. Elle se disait avant que le pire était derrière mais maintenant que l'inconnu se dresse à nouveau face à elle... est-ce que le pire ne resterait pas à venir?

Qui était-elle pour pouvoir arrêter la Guerre, au final? Elle n'était qu'une jeune fille de 16 ans, et demi certes, mais en manque d'expérience sur tellement de choses. Elle n'était qu'une enfant qu'on avait forcé à grandir, qui avait dû prendre en maturité en quelques mois à peine, qui avait dû apprendre à penser et à voir le monde sous un angle que mêmes certains adultes n'arrivent pas à percevoir. Et alors quoi? Elle allait arrêter la Guerre? Une Guerre vieille de 7000 ans allait s'arrêter parce que madame Saphira le demandait? C'était naïf oui. Mais Saphira s'autorisait à être naïve. Maisie lui avait tout expliqué et elle croyait fermement en une solution plus pacifique que l'extermination d'un des deux camps.

Plongée dans la contemplation de la photo, elle n'avait pas remarqué, elle n'avait pas entendu que quelqu'un approchait de la porte de sa chambre. Trop absorbée par les souvenirs qui l'envahissaient et qu'elle redoutait de laisser derrière elle. Enfin, elle savait qu'elle ne laissait rien en arrière. Elle emporterait tous ses souvenirs, elle en ferait sa force pour continuer à se battre. Mais cette fois-ci, pas pour la Guerre mais contre la Guerre. Car il était temps que tout cela cesse, une bonne fois pour toute. Elle s'en sentait capable, elle avait l'impression de pouvoir enfin être utile.

Elle pouvait faire face au mieux de fuir comme elle l'a constamment fait depuis six mois.

-Saphi ? J’peux entrer ?

Elle se retourne alors vers la porte, posant ses mains et la photo qu'elle tenait sur ses genoux. C'est la voix de son père qui vient de retentir. Son coeur se serre un peu mais elle est heureuse qu'il soit venu.

- Oui, rentre !

La porte s'entrouvre et elle croise alors le regard de son père. Toujours le même. Elle sait que sa décision ne lui plaît pas. Cela ne lui plaît pas non plus de s'en aller loin d'eux à nouveau. Mais elle sait que c'est la bonne décision à prendre.

-Alors ça y est, hein ? C’est le grand jour…

Elle lui sourit alors, tentant de le rassurer comme elle peut. Le sourire qui veut dire je suis triste mais je vais bien malgré tout. Elle sait ce que cette scène lui rappelle car elle a exactement la même sensation.

- Oui, c'est le grand jour...

Elle reste quelques secondes statiques avant de se décider à se lever pour aller ranger la photo qu'elle tenait dans sa main dans sa valise, la cachant dans ses vêtements pour être sûre de ne pas l'abîmer. Et chacun de ses pas lui rappellent le jour où elle s'est envolée pour la Congrégation. Le jour où elle aurait dû dire non.

Mais aujourd'hui c'est différent, pas vrai?

- Je sais bien ce que tu penses... ce n'est pas pareil qu'avant.

Elle se tourne alors vers son père, souriant toujours légèrement -toujours, ne jamais baisser les bras, rester forte- malgré les nombreuses cicatrices marquées à jamais sur son âme. Elle croise ses mains devant elle.

- Je sais ce que je fais aujourd'hui. J'ai beaucoup changé tu sais ! J'ai beaucoup grandi aussi... et je... tout ce que je fais, c'est pour nous, pour vous, tu le sais bien?

Elle veut en être sûre, en être persuadée. Elle ne s'engage pas une nouvelle fois dans la Guerre pour elle-même, elle le fait pour eux. Même si son père ne le sait pas et elle espère qu'il ne le saura jamais, elle veut stopper la Guerre pour pouvoir enfin revenir le coeur léger et lui dire "ça y est, on peut réellement vivre maintenant".

- Mais vous allez me manquer quand même...

Plus que tout en ce monde.

Malgré toutes les émotions qui la traversent, elle sourit Saphira comme elle a toujours su le faire. Sourire aux épreuves qui lui faisaient face, sourire à tout ce qui se dressait sur son chemin. Elle était ainsi. Positive en toute circonstance car ce qui nous attend demain ne peut être que meilleur. Évidemment que laisser son père derrière elle lui brisait le coeur, plus que tout. Il s'agit sûrement de la décision la plus dure qu'elle n'ait jamais eu à prendre. Mais elle sait qu'elle doit le faire. Pour la bonne cause. Pour la paix. Pour la fin de la Guerre. Pour que plus jamais, ni lui, ni elle, ni personne n'ait à se battre.

-Je sais, fifille... Tu... as vraiment grandi, hein ? Vraiment vite...

Elle hoche doucement la tête, regardant un instant vers l'extérieur. Elle fut bien obligée de le faire, et elle n'a toujours pas fini. Cette Guerre l'a forgée, lui a forgé un mental d'acier. Un mental plus fort que ceux de certains adultes déjà bien avancés dans l'âge et l'expérience pourtant. Même si tout n'est pas complet : à se construire trop vite, certaines pièces manquent. Même si elle ne le montre pas, sa confiance en elle s'évapore peu à peu. Le stress et l'anxiété prennent de plus en plus une place débordante dans son coeur. Mais de tout cela, elle ne montrera rien. Car trop de gens comptent sur elle, trop de vies sont en péril.

- Oui... mais ce n'est pas grave ! J'ai encore beaucoup de choses à apprendre et beaucoup de choses à développer... je pourrai prendre plus de temps pour moi là-bas.

Comme c'est faux, c'est entièrement faux, elle ne fera que s'enfoncer un peu plus dans les combats, dans la haine des gens. Elle tentera de comprendre leur colère et de la casser, pour la remplacer par le pacifisme. Le pacifisme, tout est dans ce mot actuellement. Toute sa vie, tout son quotidien va s'inscrire dans cet unique but. Elle sait que ça sera dur Saphira. Elle ne se fait plus d'illusions quant à la réalité de la Guerre et de ce qui l'attend, une fois les portes de son foyer franchies.

Elle a peur, elle est anxieuse. Qui lui dit qu'elle réussira? Rien n'est certain. Mais depuis qu'elle a fuit, depuis qu'elle s'est exilée, rien n'a jamais été aussi incertain dans sa vie. C'est pour cela qu'elle se lance : car elle a tellement à y gagner si tout réussit.

Voler de ses propres ailes. C'est cela ? Trouver ses ailes de papillon, cesser d'être perdue dans ce monde et s'envoler enfin, pouvoir tout affronter. Ce serait si beau. Alors elle hoche la tête. C'est promis, elle les trouvera, ses ailes. Et une fois trouvées, elle ne les lâchera jamais.

Et lorsqu'elle avoue qu'ils lui manqueront beaucoup -mais c'était une évidence, qu'elle tenait à souligner malgré tout- et qu'elle s'en va malgré tout le coeur lourd, son père vient la prendre dans ses bras. Saphira pose alors son menton sur son épaule et ferme les yeux, venant le serrer aussi fort qu'elle le peut dans ses bras. Comme s'il s'agissait de la dernière fois, car demain est incertain. Les étreintes rassurantes de son papa lui manqueront plus que tout. Une fois qu'elle sera partie, il ne sera plus là pour la prendre dans ses bras et lui dire que tout va bien. Qu'il n'y a pas à s'en faire car papa est là.

Car aujourd'hui, elle s'engage pour le protéger.

-Toi aussi fifille... Tu ne peux pas savoir à quel point tu vas me manquer... À quel point j'ai peur pour toi... Et que je n'ai pas envie de te voir partir encore..

- Tu ne dois pas avoir peur pour moi... je suis forte maintenant. Grâce à toi, je peux tout affronter désormais.

Parce qu'il lui a toujours donné la force et le courage qu'elle cherchait lorsqu'elle se perdait un peu trop dans l'ombre.

Elle le relâche un peu, évitant ainsi de l'étouffer sous son étreinte un peu trop sincère. Elle le laisse caresser ses cheveux, lui souriant doucement. Elle sait ce que cela lui fait, car elle le ressent aussi. Mais ils ont toujours été plus fort que tout ça, tous les deux. Ce n'est pas aujourd'hui que cela va s'arrêter.

-Tu m'enverras des lettres, hein ? Comme ça tu me raconteras tes aventures !

Elle hoche alors vigoureusement la tête. Évidemment, où avait-il la tête? Bien sûr qu'elle le ferait. Elle vient alors recourber tous les doigts de sa main droite, sauf l'auriculaire venant le tendre vers son père.

- Promis je le fais, si toi aussi tu me racontes tout ce qu'il se passe à la maison !

Pour que plus jamais, la Guerre ne les sépare.

Il y avait deux choix devant elle. Deux choix difficiles, qui changeraient chacun à leur façon sa vie.

Le premier était de s'en aller, de suivre Maisie vers cet idéal partagé par d'autres membres, tout aussi maudits qu'elle par cette Guerre. Elle pouvait tenter de changer les choses, encore maintenant, elle s'autorisait à espérer que son intervention pouvait faire basculer la tendance, que tout pouvait se bousculer -et si seulement elle savait, si seulement- et qu'elle pourrait offrir une vie tranquille, une vie banale comment ils l'ont toujours souhaité à sa famille, ainsi qu'à d'autres.

Le deuxième était de rester, de juste fuir les deux camps qui la pourchassaient. Changer de location, se cacher constamment, mais être avec sa famille... tout en la mettant en danger. Elle y avait déjà pensé plusieurs fois. Si Saphira se séparait de son père, il aurait moins de gens sur son dos étant donné qu'une partie continuera à la suivre forcément. Ca faisait un moment qu'elle y pensait en vérité. Même si cela lui brisait le coeur de se dire ça, ils seraient tous trois mieux sans elle.

Son choix était fait, et elle ne reviendrait pas sur sa décision.

Et alors elle avait tendu son petit doigt, symbole d'une promesse. Elle était toujours formelle : elle ne brisait jamais ses promesses. C'était quelque chose de sacré. Elle pensait toujours du plus profond de son coeur ce qu'elle disait, et lorsqu'elle promettait, il ne s'agissait jamais de paroles en l'air. Si l'on n'est pas sûr de ce que l'on fait, autant ne pas promettre.

- Bien sur, fifille ! Je te le promets.

Et alors ils s'étaient tout deux serrés les doigts, scellant ainsi les paroles et les actes dans le coeur de la jeune fille. Et si un jour cette promesse se brisait, elle saura qu'elle aura de quoi s'inquiéter, car jamais son père ne la briserait sans raisons.

- Wah. C’est peut-être la première fois que je vois cette chambre rangée.

Elle fronce les sourcils, souriant alors tout en venant mettre les poings sur ses hanches. C'est vrai qu'elle n'était pas très ordonnée de nature mais tout de même, ça allait encore ! Sa chambre n'était pas tant un capharnaüm que ça.

- Eh oh, t'abuses là ! Franchement c'était pas si mal que ça. Et puis, tu peux bien parler. Je dois bien tenir ça de quelqu'un.

Et elle avait sourit en disant cela -sourit comme elle ne le ferait plus bientôt, ce sourire qu'elle allait perdre-. Sourire et positiver avaient toujours fait partie de ses principes de vie.
Mais que se passait-il lorsque le coeur et l'âme était brisée, au point de ne plus savoir comment faire?

- Et sinon ? Tu m’as pas dit qui il y aura là-bas. Il y aura ton amie Maisie, et d’autres aussi ? Part contre, s’il y en a qui te font chier ou qui te tournent autour, papa traverse le continent pour leur casser les dents, hein !

Elle pouffa de rire un instant avant de réfléchir quelques secondes. Elle ne connaissait personne de ses futurs camarades de combat, à part Maisie. Elle lui avait cité quelques noms qui ne lui disaient pourtant pas grand-chose.

- Hmmmm... je ne sais pas vraiment. Je ne connaîtrai que Maisie là-bas je crois. Je me ferai des nouvelles connaissances ! On a presque tous le même âge de toute façon.

Si triste dans un certain sens. Si jeune et pourtant déjà détruits de l'intérieur par une guerre dans laquelle ils ont été happés contre leurs grés. Si jeunes et pourtant prêts à tout perdre pour sauver le monde entier... si seulement ils avaient encore des choses à perdre.

- Mais t'inquiète, personne m'embêtera, tu me prends pour qui? Le premier qui me cherche misère, je l'envoie au tapis ! Mon Maréchal m'avait appris plein de prises genre une où tu prends le poignet, elle mime alors l'action, semblant prise dans son explication, tu le tords comme ça CRAC et puis bam son bras dans son dos, tu appuies sur ses genoux et tu le mets à terre c'est terminé.

Elle se releva alors de sa démonstration, remettant ses cheveux derrière son dos d'un geste de la main avant de reposer une main sur sa hanche.

- C'est que j'ai encore mes réflexes de jeune fille moi.

Et peut-être que.
Peut-être que ce n'était pas encore assez.
Pour ce qui l'attendait dehors.

Saphira profite de l’instant présent avec son père. Elle ne sait pas si elle aura l’occasion de le revoir prochainement alors elle profite, elle tente de chasser ses doutes et ses craintes de son esprit, histoire de graver ce moment heureux dans son esprit, profondément, pour ne jamais l’oublier, pour y repenser lorsqu’elle se sentira mal et au plus bas. Car malgré ce qu’elle essaie de se dire : elle repart à la Guerre, encore.

Elle va lutter contre cette Guerre, contre les deux camps, tenter de les empêcher de s’entretuer. Mais elle sait que les combats, elle n’y échappera pas. La Guerre la rattrape partout où elle va, elle fait partie d’elle maintenant. Alors, juste le temps d’un instant. Redevenir l’adolescente qu’elle était avant que tout cela ne commence, et plus le soldat en exil et recherché par le monde entier.

- Tu sais pourquoi tu as deux parents ? Parce que y'en a une qui te montre le bon exemple, et l'autre le mauvais exemple.

Et elle rit avec lui. C’est bien vrai. Son père est un peu l’exemple pour les bêtises en tout genre alors que sa mère est quelqu’un de beaucoup plus sage et posée. Et c’est ça qui fait leur force à tous, à cette famille, cette diversité et cette complémentarité. C’est tout ça qui doit être préservé.

- N'abuse pas, tu es quand même un bon exemple à suivre aussi. Tu es très courageux et tu fais tout pour ta famille, c'est quand même un bon exemple à suivre.

Ensuite, il lui demande si elle sait quelque chose sur les gens avec qui elle partagera désormais sa vie. C'est vrai qu'à part Maisie, elle ne connaît pas grand-monde. Elle ne lui a pas donné tous les noms aussi, certains lui semblent familiers -elle les a sûrement déjà entendus lorsqu'elle était à la Congrégation- mais cela ne lui semble pas si grave. Ce sont des gens qui comme elle, fuient la Guerre et veulent que la fin arrive. De la Guerre. Pas du monde évidemment.

- De ton âge, hein...

Saphira hausse les épaules. Elle, ça ne lui fait pas grand-chose. C'est presque logique. Déjà, les plus jeunes sont souvent les plus éclairés. Et puis...

- Oui... après c'est normal presque... à la Congrégation, on était beaucoup de jeunes. C'est rare ceux qui dépassent trente ans. Peut-être qu'ils survivent pas, ou que l'Innocence choisit exclusivement des jeunes. J'sais pas.

Elle dit ça car elle a vu cet air. Elle essaie de se vouloir rassurante mais ça ne marche pas beaucoup. Elle n'y peut rien après tout. Il y a même des classes dans la Congrégation, pour que les plus jeunes puissent suivre l'école. Il y a aussi des enfants, encore plus jeunes que Colin. Alors oui... ça ne l'étonne pas.

- C'est que t’es devenir forte, ma fifille ! Fais-leur ça s'ils t’approchent, je viendrai les achever !

Et le Papillon rigole à nouveau. Evidemment qu'elle l'appelera. Toujours, parce qu'elle sait qu'il répondra toujours présent si elle est en danger. Evidemment, hein?

Soudain, il sort un paquet de cartes de sa poche, tout en fouillant dedans. Elle le fixe, intriguée par ce geste. Pourquoi un paquet de cartes?

- Tu sais Saphi, parmi les Noés, il parait que je suis la Chance. Et puis, c'est bien vrai. J'ai eu la chance d'avoir la meilleure des femmes et les meilleurs enfants.

Elle sourit doucement Saphira alors qu'elle vient remettre ses cheveux derrière son oreille tout en ricanant.

- Tu peux dire la meilleure des filles parce que Colin... non je rigole. Même s'il m'ennuie parfois, c'est le meilleur des frères.

Il prend alors sa main et vient lui poser une carte dedans, qu'elle regarde et observe attentivement tout en écoutant son père.

- C'est pas grand chose mais... estime que c'est un peu de la Chance que j'ai, et que je te donne. Comme ça, même si papa n’est pas là... D’une certaine manière, il restera avec toi et te protègera.

C'est une jolie carte, la reine de coeur. Elle ne sait pas vraiment si tout ça a un sens derrière, si la Reine de Coeur a un pouvoir magique spécial dû à ses pouvoirs de Noé. Mais le geste la touche beaucoup. Elle fixe longuement la carte. Alors, elle aura un peu de chance avec elle? Elle aura une petite partie de son père toujours auprès d'elle, qu'importe ce qui lui arrive?

Elle sourit Saphira. Un peu tristement quand même. Car elle sait une partie de ce qu'il va lui arriver. Et elle sait que ce sera difficile. Mais lui, il n'a pas besoin de le savoir. Alors tout doucement, elle vient mettre ses bras autour de son cou pour venir la serrer contre elle, tout en tenant fermement la carte dans sa main.

- Merci papa... j'y penserai lorsque ça n'ira pas. Mais y'a pas de raisons, tout se passera bien, c'est promis promis juré même.

Après un moment, elle le relâche et regarde la carte à nouveau.

- Elle a un pouvoir magique la carte? Genre se transformer en bouclier stylé?