Des conversations -simples, anodines, au rythme de balades printanières-.
Des rires -discrets, amusés, au rythme des rencontres et des ragots-.
Et tant de sourires -de cœurs légers qui simplement-.
N’avaient rien à redouter.
Et. Autour d’eux, il y avait presque de quoi jalouser -tous ces gens, qui n’avaient rien à craindre de plus qu’une vie ennuyeuse -et peut-être revivre ainsi l’espace d’une journée aurait tout valu -et peut-être qu’un jour -oui, un jour, mais pas aujourd’hui----. Car. Malgré Amaury -il était possible de l’appeler cousin, il fallait juste oser -et s’en souvenir--, Melchior, le parc, le soleil, les rires, les discussions et cette ville qui semblait avoir tant à offrir. Il ne fallait pas. Jamais baisser sa garde. Cette vie, elle n’était plus pour elle. Et c’était comme se trouver de l’autre côté d’un fossé -un miroir -une autre réalité-- que de l’observer s’écouler sans elle.
Et, le chien de revenir pour réclamer une caresse.
Pour la faire revenir -se reprendre -se concentrer -inutile de l’inquiéter -pas alors qu’ils venaient de se rencontrer---.
Pour, ensuite, la quitter.
Et quémander à son nouvel ami.
Se ressaisir, comme le parisien le faisait -vraiment, son humour laisser à désirer -mais ce n’était certainement pas avec cela que l’on survivait -alors autant le laisser à d’autres---.
« Bien sûr ! Bien sûr. Paris n’est pas que la ville des cafés sur les boulevards, on peut trouver de petits salons de thé plus calmes et, surtout, plus discrets, » l’informa-t-il dans un sourire hésitant qu’il voulait bien plus confiant qu’il ne l’était.
Alors. Hocher la tête. Et suivre le garçon qui se mettait déjà en route. Et une brève impression de soulagement. Le parc avait été agréable -avec son odeur d'herbe fraîchement coupée, de fleurs récemment éclosent et de soleil-. Mais le parc était trop -ouvert, fréquenté, inquiétant-. Alors. Le quitter sans regret pour gagner une tranquillité méritée -sinon, impossible de profiter de cette rencontre -et Amaury la prendrait rapidement pour une sorte de folle à fixer les alentours avec angoisse sans jamais se concentrer sur leur conversation -et ce n’était certainement pas l’impression qu’elle souhaitait donner---. Et le chien de les suivre, bien trop content de découvrir de nouveaux lieux -truffe et langue au vent, rien ne pouvait l’arrêter -à défaut des souvenirs que la ville exhumée dans sa mémoire -ah, ça semblait si loin -ce temps où elle était exorciste----.
Et bientôt.
Le parc remplacé par les rues -encore plus vivantes-.
Et à nouveau.
Cette inquiétude -non, la capuche n’avait pas bougé-.
« Tu … » Et sa voix, pour rappeler que le silence n’était guère utile ou appréciable lors d’une rencontre comme celle-ci -il fallait vraiment -vraiment- qu’elle fasse un effort -l’impression qu’elle donnait était catastrophique -à en témoigner la grimace qui étira discrètement ses lèvres---. « Pardon ma question est sans doute indiscrète, tu peux me dire n’importe quoi ou même ne pas me répondre, mais. » Mais ? Suspicieuse, ne comprenant pas où il souhaitait en venir, elle détourna son regard pour le fixer -et cette dame avec son chapeau à plumes n’avait pas tant l’air d’un akuma -normalement--. Rencontrant cet éclat de détermination qui semblait être un curieux trait de famille -quelque peu déstabilisant, toutefois-. « Tu as dit tout à l’heure que tu étais déjà venue à Paris, et maintenant tu préfère un endroit discret … Est-ce que tu as eu des ennuis ici ? Non parce que si c’est le cas, on peut en parler à Papa ! Enfin je veux dire à Cyrus, hm. Il pourrait t’aider en enquêtant sur ceux qui te font prendre toutes ces précautions, pour ensuite en parler à la police. Comme ça, tu pourrais revenir plus sereinement. »
Ah. Vraiment.
Il fallait vraiment faire un effort.
Et. Comme elle aurait voulu tout lui expliquer. Lui dire que ce n’était ni sa faute -si elle savait -ne l'avait-on jamais mit en garde -les ennemis étaient n’importe qui -partout----, ni la faute d’ennuis communs -et elle aurait mille fois préféré ça -du moins, elle s’en serait débarrassée depuis bien longtemps -ça, au moins, ça ne lui faisait pas peur---. Faire comprendre que, malgré toute sa bonne volonté -et elle brillait si fort dans ses yeux-, il ne pouvait rien faire -vraiment ?- mais que ce n’était pas grave -parce que c’était ainsi et que, aujourd’hui, ce n’était pas différent -vraiment ?- mais que, peut-être, demain ça le serait -sûrement ?--. Mais. Impossible de le faire passer de l’autre côté du miroir -si elle savait -qu’il était déjà de ce côté--, de lui apprendre la vérité. Et. Qu’aurait-elle pu y gagner. Passer pour réellement folle ou, dans la meilleure des hypothèses, ne pouvoir recevoir d’aide car les réalités si différentes -vraiment, si elle savait-.
Alors.
Un simple sourire.
Désolé.
Si tu savais, Amaury.
« C’est un peu étrange mais … On fait partie de la même famille maintenant, alors on doit s’épauler, tu ne crois pas ? Même si on ne se connaît que depuis deux jours à peine. »
Oui. La même famille. Et c’était bien pour cette raison -et parmi tant d’autres- que la vérité ne pouvait venir gâcher cette rencontre -elle gâchait déjà bien trop de choses-. Alors. Se concentrer -vraiment- et faire en sorte qu’aujourd’hui -juste aujourd’hui, tout irait bien--.
« C’est… C’est gentil, mais je n’ai pas d’ennuis ici, ça va, » voulu-t-elle le rassurer d’un sourire qui devait être plus vrai qu’il ne l’était. « Je ne suis pas trop à l’aise dans la foule, c’est tout. » Et c’était un horrible sentiment de culpabilité que de lui mentir de cette façon -même si, cette fois, il y avait une part de vérité - alors qu’il souhaitait l’aider -mais comment faire autrement ?-. Même si, certainement pas stupide, il remarquerait les incohérences -il faudra faire avec, désolée-. « Je suis déjà venue voir une amie, » expliqua-t-elle pour changer de sujet -pour empêcher les trop nombreuses questions -qui n’auraient que si peu de réponses-- « mais… Elle n’est plus ici. Et… J’ignore si nous sommes toujours amies. C’est compliqué, parfois, tu ne trouves pas ? »
Tout.
En général.
Lorsqu’il faut mentir à sa famille.
À ses amis.
Aux personnes qui comptent -vraiment-.
Parce qu’il faut les protéger.
Comme toi, Amaury.
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