Cette journée vous laissera un goût d’inachevé.
Parce qu’elle ne le sera jamais réellement, n’est-ce pas ? Comme l’Océan rappelle toujours à lui ses joyaux écumés, la guerre ne laisse jamais repartir les victimes qu’elle prend entre ses griffes. Vous le savez — il n’y a que deux façons d’y échapper : mourir, ou survivre (mais pour chacun d’entre vous, plus jamais il ne sera question de simplement vivre). Et certains jours, vous avez l’impression que le seul véritable choix qu’elle vous laisse encore, c’est de choisir aux côtés de qui vous allez mourir.
Des jours comme aujourd’hui.
Bien-sûr, vous survivrez encore. Vous survivrez toujours — c’est ce qui vous a tous réunis, vous les écorchés, vous dont les yeux cachent des cimetières, vous dont les larmes ont noyé trop de rêves. Vous survivrez — mais à quel prix ? Que restera-t-il de vous, à la fin ? Et vous êtes comme ces feux de forêt que le vent attise, et vous êtes comme la flamme d’une bougie qu’un simple souffle éteint. Un pied dans la tombe, l’autre qui parcourt les champs de bataille (un pied dans la gueule du loup, l’autre dans la cage du lion — et les deux pour courir, toujours (courir pour échapper à ce qui vous poursuit (courir après ce(ux) qui vous échappe (courir, toujours)))).
Vous ne savez plus vraiment combien de jour se sont écoulés depuis celui-ci — et lorsque vous voyez ces sourires chaleureux qui vous attendent, ces bras qui vous sont tendus et ces mots réconfortants qui déjà vous parviennent ; vous réalisez que ça n’a pas d’importance (et l’espace d’un instant (trop court mais (dans la guerre, un instant est un instant (et chaque instant est un instant qu’elle ne vous volera pas))) vous oubliez et la fatigue, et les larmes, et la peur).
Vous êtes de retour chez vous, ensemble.