[Intrigue, Chap. VII, Phase IV] Ceux qui sauvent

Une voix avait retenu l'attention de l'exorciste.
Une voix qui lui rappelait un doux souvenir, une nouvelle amitié tissée.
Une voix qui lui fit comprendre tant de choses.

Et puis, d'un coup, elle comprit. Tout. Comme un éclair qui venait de la toucher en plein coeur. Elle avait tout compris ; tout faisait sens à présent. Et encore une fois, elle se rendit compte qu'une de ses amitiés appartenait au camp ennemi. Elle avait les yeux rivés sur cette chevelure blonde, sur cette jeune fille, pas plus âgée qu'elle ; sa nouvelle amie, aujourd'hui potentielle ennemie. Elle se souvenait de leur moment, comme si c'était hier. De la main qu'elle lui avait tendu pour grimper sur les toits de Londres à leur échange profond sur la Guerre Sainte. L'inquiétude gagnait le coeur de l'exorciste ; Lucie s'était-elle jouée d'elle ? Avait-elle réellement perdu la mémoire ? N'était-ce qu'un jeu pour l'apôtre ? Toutes ses explications faisaient sens ; pourquoi les akumas n'avaient pas pu la tuer. Non, Lucie ne s'était pas jouée d'elle ; elle avait été réellement amnésique, elle avait été réellement perdue et elle avait cherché son chemin.

Et tu espérais tant qu'elle l'avait trouvé. Tu espérais si fort ; mais tu avais tant mal.
Tu venais de comprendre que Lucie n'était plus, qu'il ne s'agissait que de Bonnie.
Mais Bonnie c'était Lucie, n'est-ce-pas ? Il s'agissait bien de la même personne, non ?

La bouche de la blonde s'ouvrit comme si elle voulait dire quelque chose, comme si elle voulait poser toutes les questions qui alourdissaient son coeur. Mais elle ne pouvait pas ; pas maintenant, peut-être jamais. Alors elle se détourna de l'apôtre, ravalant ses larmes, ravalant tous les sentiments qu'elle pourrait ressentir. Ce n'était pas le moment. Alors que Vivaldi prenait place de nouveau près d'elle, Destiny se mit en position pour attaquer, une nouvelle fois. Toutefois, elle n'attaqua pas, elle avait appelée par une autre voix ; une voix amicale, une voix qu'elle avait pu aider récemment. Célania était arrivée à sa hauteur et lui demandait si elle allait bien. Rapidement, elle put constater que son amie n'avait pas de blessure apparente ; elle n'avait pas le temps de se demander ce qu'elle faisait ici, comment elle était arrivée ici. Son aide sera si précieuse.

« Je vais bien ! »

Arriva-t-elle juste à lui dire.

Alors que la violoniste était en position, elle sentit Célania bouger à côté d'elle.
Et elle se sentit mieux, comme si elle était protégée d'une douce enveloppe.
Elle ne savait pas ce que Célania lui avait fait mais cela lui faisait du bien.

« Merci ! Fais attention à toi également ! »

Un léger sourire aux lèvres, elle jeta un oeil vers Célania qui repartait à l'offensive. Destiny jeta un regard à Vivaldi et à eux, ils partirent à l'offensive, également. En duo, ils jouaient, et en duo, ils attaquaient. La jeune fille lança de nouveau des minis tornades sur le déchu qu'elle avait précédemment attaqué ; celui qu'elle avait vu, celui qui avait aidé. Elle aimerait tant savoir son prénom, elle aimerait tant le remercier. Elle aimerait tant l'aider. Elle aimerait tant que sa souffrance s'arrête. C'était si dur, et elle n'imaginait pas leurs souffrances, à tous les deux. Elle était sentimentale, au fond. Elle avait de l'empathie, même si elle arguait l'inverse. En si peu de temps, il y avait tant de choses qui se passaient autour d'elle ; et ce n'était pas fini.

Une autre voix l'interpela ; hurla son prénom. Elle sentit le désespoir dans cette voix, si connu ; cette voix qu'elle appréciait tant. Elle se tourna vers celle-ci et reconnut sans mal sa première amie à la congrégation, Madalia. Les yeux de l'exorciste s'écarquillèrent en la voyant courir si difficilement jusqu'à elle ; elle voyait son bras, elle voyait l'enfant qui convulsait dans ses bras. Elle pleurait. Madalia pleurait. Son coeur se brisa ; si les restes de son coeur pouvaient encore se briser. Elle se mit à courir pour la rejoindre. Destiny la regardait, bouche bée, comme si elle était en pause. Et elle criait, elle lui demandait de le sauver, elle lui disait qu'aucun d'eux trois n'avait cherché à entrer dans cette guerre. Madalia était devant elle, au sol, l'enfant dans ses bras. Encore une fois, elle comprit ; que l'enfant sous ces yeux était comme les deux déchus, qu'ils se connaissaient, qu'ils étaient potentiellement amis.

Je t'en prie...

Et c'était au tour de Destiny de se mettre à pleurer ; de s'effondrer en entendant les supplications de Madalia, en ayant mal pour ces trois hommes qui n'avaient rien demandé. C'était un miracle si le jeune garçon en face d'elle n'était pas lui même un déchu. Elle respirait mal, comme si tout l'étouffait, comme si sa mère était là, comme si elle revivait tout. Ses épaules étaient si frêles, comme les leurs, comme celles des autres. Mais Destiny n'avait pas l'intention de laisser l'enfant mourir. Elle sécha ses larmes, reculant d'un pas et l'innocence opéra ; elle avait extrait la partition du jeune garçon afin de le soigner. Fort heureusement, elle savait où réparer la partition, où soigner l'enfant. Une seule blessure par un déchu ne pardonnait pas ; elle le sauverait, elle le soignerait. Sa nouvelle force lui permettait d'aller plus vite.

Mais elle se demandait ; elle caressait l'espoir, un léger espoir, en regardant Enos, en le regardant être soigné. N'était-elle pas totalement folle ? Très certainement. Mais elle avait une idée ; elle avait su ce qui arrivait aux déchus, la congrégation en avait parlé, naturellement ; pour éviter de nouveaux cas. Une légère chaleur enveloppa son coeur tandis que son cerveau travaillait assez vite, trop vite. Et lorsque l'innocence finit d'opérer, la partition retrouva sa place ; elle se baissa, posant sa main sur la joue du jeune garçon, la caressant doucement. Et machinalement, elle s'adressa à lui.

« Est-ce-que tu peux me dire ton nom ? Leurs prénoms ? »

Il commença à faire des signes, à chercher à lui faire comprendre ; mais elle ne comprenait pas. Elle comprenait juste qu'il était muet, ou alors qu'il ne parlait pas, mais elle n'avait jamais appris la langue des signes. Elle retira la main de sa joue, tenant son violon et son archet dans l'autre ; et elle tendit cette main vide à l'attention du jeune homme.

« Tu pourrais me les écrire sur ma main ? S'il te plait ? »

Et de son doigt, il écrivit.
À chaque fin de prénom, il appuya sur la main de l'exorciste, comme s'il y avait un point.
Il désigna chaque déchu avant d'écrire leur prénom sur la main.

Elle avait soigné Enos.
Elle avait aperçu Aronne.
Elle avait été aidée par Josef.

Destiny le remercia, d'un léger sourire avant de se tourner vers Madalia.
Elle souffrait tellement, terriblement.
Et sa main libre vint trouver la joue de son amie, recueillant ses larmes.

« Prends Enos avec toi et allez vous mettre à l'abri. Tu as mal, je le vois bien. »

Elle se leva et ses mains, machinalement de nouveau, se remirent à jouer ; elle voulait apaiser Madalia, le temps d'un instant, lui permettre de souffler avant de partir, loin de ces innocences qui faisaient mal à son bras, qui lui faisaient mal à elle. Elle voulait modifier son bras, elle voulait l'apaiser. Elle savait qu'elle ne pouvait pas modifier son bras ; alors elle s'était demandé si elle pouvait créer une partition comme pour ses compositeurs. Elle se demandait si cette partition pouvait prendre la place de la partition existante de Madalia, le temps de quelques instants. Elle ne savait pas si c'était possible mais avec la force que lui avait prêté Célania, tout lui semblait possible.

nouvelle partition ;
identité - madalia cuervo
caractère  - pas de changement.
histoire -  pas de changement.
apparence - pas de changement.
bras akuma - contrôle total par madalia cuervo
précision - le bras akuma est apaisé, il n'y a plus d'effets négatifs à cause de l'innocence tant que la partition est en madalia cuervo.

Et elle ne savait pas par quel miracle elle avait réussit son coup ; mais la partition intégra le corps de Madalia, sans aucun problème. L'exorciste regarda son amie, lui souriant ; oh, Madalia, qu'est ce le monde a fait de toi. Destiny jouait en continu, par peur que la partition n'opère plus ; elle avait bien trop peur de cette puissance qu'elle avait pu acquérir le temps d'un instant, de quelques instants.

« Cela va t'aider, je ne sais pas combien de temps ça va tenir ; partez, maintenant, mettez-vous à l'abri ! »

L'exorciste suppliait son amie du regard ; rester près des déchus allaient les perdre, allaient les faire souffrir. Un dernier sourire et Destiny partait en courant ; elle avait un plan. Un plan fou, un plan suicidaire ; mais un plan qui pouvait les sauver, qui pouvait peut-être sauver Josef et Aronne. Et elle savait déjà à qui s'adresser ; à la personne qui pouvait l'aider à convaincre, à se battre, à sauver. Elle courait tout en jouant difficilement, mais finalement, elle arriva à bon port.

Elle arriva près de Célania.
Essoufflée, alors qu'elles ne s'étaient quittées que très peu de temps auparavant.

« J'ai besoin de ton aide, pour les sauver. »

Un regard vers chacun des déchus.
Un regard vers Josef et Aronne.

« C'est fou, probablement suicidaire mais je ne te demanderai pas de jouer ta vie pour ça. »

C'était totalement fou et suicidaire, Destiny.
Tu lui en demandais beaucoup.
Tu en demanderais beaucoup à tout le monde.

« Mais il faut essayer, et j'ai besoin de ton aide, s'il te plait. »

Et c'était à son tour de supplier ; de demander de l'aide.
Parce que grâce à elle, elle avait apaisé Madalia.
Parce qu'à présent, elle savait...

Ils ont des prénoms, tu les sais.
Ils s'appellent Aronne et Josef.